Éléments pour préparer à la
"prise de fonction"
d'après André de Peretti, extrait des Cahiers pédagogiques, n°290, janvier 1991,
pp.28-29
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Ou si vous préférez "les sages conseils de la chouette"
(inédit, Contes et fables pour l'enseignant moderne, éd. Hachette
éducation,2007) |
Lettre à un tuteur ou accompagnateur d'enseignant (juin 2010) |
[ ma formation initiale ] [ Conseils de collègue ] [ Commencer un cours de 50 façons différentes ] [ le vélo ] [ enseigner ou former ? ] [ enseigner en ZEP ] [ Débuter en S.V.T. ] [ Débuter en Anglais ] [ Débuter en Hist-Géo ]
voir aussi les liens très utiles sur
l'entrée dans le métier
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Images, métaphores et exergues pour
guider la prise de fonction |
Les « grosses pierres » de
l’enseignant débutant
Cataclysme
professionnel ? Révolution copernicienne ? Bouleversement identitaire ?
Les mots, images et métaphores, ne sont pas trop forts pour évoquer
(invoquer ?) la situation originale et répétée à plusieurs dizaines de
milliers de fois,
autant d’individus qui se fabriquent, taillent ou bricolent peu à peu
l’habit professionnel pour les dizaines d’années d’exercice du métier.
Représentations du métier et confusions des esprits ?
En
rencontrant des « entrants dans le métier » ou appelés aussi T1 (nous
aimons malgré tout les sigles), en accompagnant quelques groupes, j’ai
coutume de faire un premier sondage des « états d’âme », sinon de la
perception qu’ils ont du métier à trois mois de la rentrée scolaire.
En détournant
la technique du « photolangage »,
plus précisément, en requérant des participants pour la séance suivante de
présenter une image, photo ou représentation qui correspondent à leur
perception du moment.
En fin de
présentation toujours étonnante, surprenante et empreinte d’humour comme
de gravité, nous pouvons faire le point sur le spectre suivant des
perceptions, en traçant deux axes orthogonaux, de sorte à positionner les
mentions récurrentes :

L’entrée dans
le métier est une période fragile, où l’on quitte tout de qui ce faisait
l’environnement de l’étudiant, l’équilibre du monde familial, le confort
des réseaux, pour un inconnu improbables, quand bien même la sécurité
objective d’un concours ou d’un diplôme est là. L’individu est ici
fragilisé par la perte de ses repères. Le cadre physique, environnement,
amical, professionnel doit se reconfigurer, au moment où l’activité
sollicite des bases solides, un ancrage ferme à des valeurs, une attache à
un modèle professionnel. En plusieurs mois, en plusieurs années. C’est
une dimension à ne pas sous-estimer dans l’approche de la formation
professionnelle et dans la vie quotidienne d’une école ou d’un
établissement.
L’entrée dans
le métier est aussi déterminante, car nous y puisons l’énergie et les
modes de ressourcement qui conditionneront souvent l’exercice de
l’activité ; elle configure le « système » de navigation professionnelle,
durablement ; certes, l’exercice, par l’expérience, la formation, par son
organisation continue, les collègues, par leur fréquentation seront des
vecteurs de changements non négligeables, mais rien ne remplacera la
matrice des premières années. Cet aspect est d’autant plus préoccupant que
nous observons une certaine précarisation du métier pour les plus jeunes,
lorsqu’ils se trouvent reléguer sur des « statuts » de TZR, d’extension de
disciplines, d’éparpillement de services entre plusieurs établissements.
Ce sont des contraintes fortes qui grèvent durablement l’entrée dans une
professionnalité nécessaire.
L’entrée dans
le métier est tout aussi passionnante : en se frottant à la réalité du
terrain, le jeune collègue se confronte à la pluralité des possibles ;
l’embarras naît de la combinaison à la fois des choix contraints et de
l’urgence des situations ; l’instrumentation pédagogique, didactique doit
être ici maximale, comme le permet enfin l’internet pédagogique. Le style
d’enseignement s’édifie alors rapidement, en plus ou moins grande
conformité avec l’environnement professionnel (« la salle des profs »).
Phase critique où le jeune enseignant doit décider, plus ou moins
explicitement, soit de s’harmoniser avec son milieu, et d’en retirer une
satisfaction de compétence reconnue, mais pas toujours efficace, soit de
s’en différencier, et d’en assumer le relatif inconfort..
Mais l’entrée
dans le métier est déroutante. L’apprentissage professionnel est une
recherche dynamique de stabilisation ; la redéfinition du cadre peut
inciter le débutant à puiser dans des éléments profonds ou proches, c’est
selon, qui lui paraissent assurer une assise plus solide. Assumer la
nouvelle complexité d’un métier que l’on s’imaginait « plus simple »,
gérer son stress ou son incertitude, reconnaître son incapacité, découvrir
des valeurs enfouies et jamais travaillées, exigent une sollicitation de
toutes ses ressources.
Enfin,
l’entrée dans le métier se relève questionnante, parfois abyssale. On n’en
sonde pas les profondeurs, et la formation n’a pas cet objectif. Mais elle
peut prendre à son compte le processus de questionnement, l’analyse
réflexive qui va organiser la régulation de l’activité.
Moment de la
construction identitaire, où l’on perd et où l’on gagne, dans tous les
domaines, où se jouent l’équilibre entre l’avant et l’après, entre le
dedans et le dehors, entre le privé et le public, un moment qui tend à
présent à se distendre, à s’étendre, à se dilater sur plusieurs années, en
suivant l’évolution sociologique des « adulescents »,
ceux qui sans quitter les formes de l’adolescence connaissent les
caractéristiques du monde adulte.
Déterminer
ses « grosses pierres »
Le professeur
stagiaire serait-il inquiet ?: il a besoin d'une sécurisation. Il est
conduit de ce fait à élaborer un projet de réalisation professionnelle de
nature à assurer son insertion ainsi qu'un schéma directeur de ses
premières semaines de "rentrée", avec outillage de "première nécessité".
Il lui faut aussi récapituler les chances et les difficultés de son futur
métier, en vue de rendre possible son évaluation personnelle.
Je vous
propose un détour par un petit conte, classique sur le réseau de l’internet,
mais que nous pouvons transposer ensuite au bénéfice de nos enseignants
débutants.
"S'adressant à un groupe de dirigeants de haut niveau, un expert, et un
vieux sage, en management du temps posa un bocal à large ouverture sur la
table devant lui. Ensuite il sortit une douzaine de pierres grosses comme
le poing et les plaça soigneusement, une par une, dans le bocal. Quand
celui-ci fut rempli jusqu'au bord, il demanda : "Ce bocal est il plein ?".
Tout le groupe répondit : "Oui".
- "Vraiment ?"
Il sortit de sous la table un seau de gravier qu'il versa dans le bocal.
Il secoua ce dernier, et les graviers tombèrent dans les interstices entre
les pierres. Souriant, il demanda au groupe : "Et maintenant, ce bocal est
il plein ?"
- "Probablement pas" dit quelqu'un.
- "Bien".
Il sortit un seau de sable et le versa dans les interstices laissés par
les pierres et le gravier. Et de nouveau, il demanda : "Ce bocal est-il
plein ?"
- "Non", dit le groupe en coeur.
-
"Bien ! ", dit-il à nouveau en sortant une carafe d'eau.
Quand il eut versé de l'eau jusqu'au bord, il regarda le groupe et demanda
: "A quoi sert cette expérience ?"
Un stakhanoviste leva le doigt et dit : "Cela signifie qu'aussi bien
rempli soit un programme, si on travaille dur, on peut toujours en faire
un peu plus."
- "Non, la vérité qu'illustre cette histoire c'est que si vous ne mettez
pas les grosses pierres d'abord, vous ne pourrez pas les mettre du tout.
Si le sable est mis en premier, il n'y aura de place pour rien d'autre
Quelles sont les grosses pierres de votre vie ? Le projet que vous voulez
réaliser ? Du temps passé avec ceux que vous aimez ? Votre formation ?
Votre compte en banque ? Une cause ? Accompagner d'autres gens ?
Demandez-vous quelles sont les grosses pierres de votre vie
professionnelle et personnelle puis remplissez le bocal."

Ainsi, à
l’examen des situations, attentif aux récits des jeunes (et moins jeunes)
enseignants, du premier et du second degré, je placerai devant moi en un
cercle cinq grosses pierres en les nommant ainsi :
n
Définir son style d’enseignement :
la première et sans doute la plus urgente des pierres à tailler ; Carl
Rogers nous renseigne sur les trois points à travailler : congruence,
empathie et considération positive.
n
Approfondir sa démarche didactique : comment
il est intéressant, important, nécessaire de mettre en place très vite les
premiers éléments de sa propre formation, afin de veiller au
renouvellement et à la mise à jour de ses connaissances
n
Développer les compétences des élèves :
« faire en sorte que le temps de la classe soit le travail de l’élève »,
disait une instruction aux enseignants. Une attention bienveillante et
permanente aux développements de ressources par et pour les élèves
n
Organiser la coopération dans la classe :
« on apprend par, avec et pour les autres », l’organisation sociale et le
jeu des interactions doit dès le début faire l’objet d’une attention
soutenue de la part de l’enseignant.
n
Pratiquer une évaluation régulatrice : la
formation aux compétences, l’organisation des savoirs ne se mesurent pas
en heures, et en évaluations saccadées ; mais sur un temps long, en
marquant les réussites, les acquisitions, individuelles et collectives.
On peut actualiser la matrice des "grosses pierres" à partir des 10
compétences identifiées dans le "Cahier des charges de la formation
initiale" (BO du 1er janvier 2007):

d'après
André de Peretti, extrait des Cahiers pédagogiques, n°290, janvier
1991, pp.28-29
|
Les conseils d'André de Peretti à de jeunes enseignants en prise de
fonction |
Problématique
Le professeur stagiaire est inquiet: il a besoin d'une
sécurisation. Il est conduit de ce fait à élaborer un projet de
réalisation professionnelle de nature à assurer son insertion ainsi qu'un
schéma directeur de ses premières semaines de "rentrée", avec
outillage de "première nécessité". Il lui faut aussi récapituler
les chances et les difficultés de son futur métier, en vue de rendre
possible son évaluation personnelle.
|
Représentations
Le futur enseignant doit pouvoir
réfléchir sur les
images multiples de l'activité enseignante:
quelle exploration de l'époque, de la
société et de ses crises fait-il ?
quelle idée a-t-il de la jeunesse
moderne ?
quelle représentation de
l'environnement pédagogique porte-t-il ?
quelles images forme-t-il des
différents acteurs vis à vis desquels il sera en situation
professorale ?
quelles idées entretient-il à
l'égard de notions: éducation,
enseignement, communication,
apprentissage, rôles, compréhension, programme, contrôle,
discipline,
pédagogie, méthodologie,
inspection, administration,
formation ?
Projets
Quel projet global est-il en mesure d'esquisser en vue
d'imaginer son insertion professionnelle dans la trame scolaire, par
rapport au réseau des finalités de l'école, des objectifs généraux
de l'enseignement des contraintes de sa discipline ?
Sur quelles bases essentielles lui apparaît-il
possible d'établir les contenus de ses cours et les travaux de ses
futurs élèves, par rapport à sa propre compétence dans la discipline
?
Quelles espèces de contrats envisage-t-il de passer
avec ses futurs élèves, explicitant des objectifs, des exigences, des
vérifications ?
Quelle connaissance compte-t-il prendre des projets à
l'établissement ?
|
Les premières semaines
Quelle liste d'actions à entreprendre, préalablement
à la rentrée peut-il élaborer en vue de préparer sa prise de
fonction ?
Quelles lectures peut-il entreprendre afin de se mettre
en disposition tranquille et en accroissement de sa confiance en lui et
dans les autres ?
Quelles procédures de prise de contact avec
l'établissement et d'accueil des élèves peut-il définir ?
Quels plans des premières séances, avec quels
contenus et quelles exigences, mais aussi quels documents, peut-il
projeter
|
Outillage - ingénierie pédagogique
Quel outillage de première
nécessité peut-il rassembler et essayer en vue de soutenir ses
premières démarches: inventaire de quelques objectifs initiaux,
textes, éléments bibliographiques, échantillons d'exercices et de
tests, quelques plans de cours, des enregistrements, des documents,
quelques schémas d'exposés, quelques anecdotes pouvant illustrer son
enseignement ?
Quelles fiches de techniques d'appui
peut-il réunir (après les avoir expérimentées): modalités de
préparation d'un cours, de commencement, de fin, de relance d'un cours,
de présentation d'objectifs; modalités d'évaluation formative et
sommative, formes variées d'exposé de connaissance, etc.... ?
Quelles procédures d'organisation de
la classe et du travail des élèves peut-il avoir à sa disposition:
technique de mise du groupe-classe en sous-groupes, techniques variées
d'études en équipes, catalogue de rôles à distribuer à des élèves
pour assurer l'animation de la classe ?
Quelles méthodes de communication
peut-il envisager d'utiliser: entretien avec un élève, modes de
conseils méthodologiques aux élèves, listes de consignes d'étude,
modalités d'information pratique, processus de conduite de
réunion etc...
|
Outillage pédagogique
Quels éléments didactiques peut-il
évoquer et mettre en possibilité d'utilisation: notions essentielles,
anecdotes significatives, éléments historiques, éléments
philosophiques, gammes de méthodes variées, inventaires de normes et
d'exigences diversifiées, lexique utile, terminologie variée,
exercices pratiques ?
Quels supports pourrait-il rassembler
ou préparer: schémas, graphes, cartes, photocopies, objets, cassettes,
didacticiels, outils, robots, tableaux (sur papier, sur feutre),
carnets, cahiers, polycopiés, manuels, aide-mémoires, ouvrages
consacrés à des didactiques, check-listes de points d'appui pour
étayer son activité pédagogique, exposé du programme ... ?
Quelles données pour un contrat
didactique peut-il assembler: règles explicites pour les tâches et
devoirs, règles implicites pour des instructions opératoires et la
compréhension des questions posées aux élèves, barèmes de notation,
catalogue d'exigences diversifiées, ensemble de rôles proposables,
référentiels d'objectifs, lots de questionnaires à choix multiples
(QCM)... ?
Sur quelles ressources pourra-t-il
compter ultérieurement: liste d'adresses utiles, relations à des
consultants qui le connaissent, formation attendue à l'IUFM, choix des
éléments de compétence à développer chez lui, bibliothèque
accessibles, centres de documentation scientifique, C.D.I., musées,
ouvrages de fond, publications pédagogiques, associations de
spécialistes, C.I.O. ?
|
Chances et difficultés du métier
-
Quel cadre d'observation et d'analyse de son exercice
professionnel peut-il se fabriquer: grilles pour l'observation du groupe-classe, indications simples sur les variétés de profils
pédagogiques chez les élèves, instruments d'évaluation formative,
quelques repères pour apprécier le climat de la classe ... ?
-
Quel tableau d'alertes et de points-clefs
peut-il être
conduit à établir pour soutenir sa vigilance ?: listes des quelques
erreurs dominantes chez les élèves, inventaire de recommandations
utiles, relevé de quelques difficultés à surmonter ou de savoirs à
approfondir, précautions pour éviter les surcharges d'information et
d'exigences dans l'étude du programme ... ?
-
Quelles capacités ou caractéristiques
professionnelles devra-t-il prendre en considération dans sa propre
préparation au métier ?: compétences disciplinaires, compétences
psychopédagogiques, aptitudes d'organisation, créativité, aisance de
communication, maîtrise gestionnaire, sensibilité culturelle,
ouverture aux innovations, précautions pour préserver sa curiosité
intellectuelle...
-
Quelles attitudes pour maintenir la qualité de sa
relation à sa classe et à ses élèves ?: disposition pour se mettre
en confort intérieur, positions de sa voix pour être entendu sans
fatiguer ni se fatiguer: attention à se pas se mettre en "réactionnalité"
à des manipulations volontaires ou non de certains élèves; être
prêt à accueillir l'imprévu...
|
Quelques objectifs prioritaires pour la préparation à la fonction de
professeur
-
capacité d'accueil et de présentation (de soi, des
élèves, du programme, des objectifs, des exigences, des alertes, des
contrats simples d'études)
-
capacité de recueil et d'analyse des images et des
motivations de soi et des élèves (concernant les besoins et les
attentes relativement aux notions essentielles, sur l'institution
scolaire, en vue d'un projet global professionnel, à propos du projet
de l'établissement, relativement à la matière enseignée....)
-
capacité d'élaboration et d'exposition de
connaissances (notamment pour les premières semaines d'enseignement,
suivant un schéma directeur, comprenant des plans de séances ou de
cours avec variantes, des listes d'objectifs, une documentation, des
outils et des supports, des modalités de contrôle)
-
capacité d'organisation et d'observation de la classe
(mise en sous-groupes, distribution de rôles et de consignes d'étude,
grilles d'observation des élèves et de son propre comportement,
relevé des difficultés les plus habituelles...)
-
capacité d'encouragement et de motivation des élèves
(instruments simples d'évaluation formative, modalités d'entretiens
personnalisés, conseils méthodologiques élémentaires pour une
équipe en petit groupe, aptitude à organiser des moments de détente
et/ou de fête...)
-
capacité de préparation méthodique de ses cours
(études documentaires, catalogue d'outillage et de ressources
didactiques, modalités d'élaboration d'objectifs et de déroulement
pour des cours, inventaire de recommandation, vérification de ses
propres attitudes et tendances, exercices d'imagination et de
créativité à utiliser éventuellement, choix de métaphores pour
illustrer les cours et aider à la mémorisation...)
-
capacité de perfectionnement permanent de ses
compétences personnelles et professionnelles (recherche assidue des
éléments de compétence à développer pour soi, examen du PAF,
rapports avec le conseiller pédagogique et les autres collègues,
rédaction soigneuse de fiches décrivant les diverses pratiques
d'enseignement essayées, présence active en IUFM, lecture méthodique
des ouvrages professionnels suivant un plan de lecture, ouvertures
culturelles...
Ce travail trouvera toute son ampleur à être assorti de
grilles de thèmes de formation. La réflexion sur les thèmes de formation sera
à mener non seulement à propos de l'année de stage, mais devra se porter
utilement sur les thèmes à aborder au cours de la carrière d'enseignant
conçue dans le long terme.
C'est au prix de telles actions que l'institution pourrait
aider l'enseignant à assurer un début professionnel harmonieux et équilibré.
|
Images, métaphores et mots destinés aux enseignants
débutants |
« est maître de l’espace celui
qui l’organise » : quelle attention portons-nous à cette
organisation de l’espace (et du temps ?) ?
« faire
en sorte que le temps de la classe soit le travail de l’élève » : ne
nous trompons pas de « vedette » : certaines « prestations » de stagiaires
visités peuvent être trompeuses : une certaine aisance mais rien ne se passe du
côté des élèves
le travail devient possible, si
le climat est positif, si l’élève n’est pas vu comme un ennemi mais comme un « partner » :
que nous est-il donné à voir
d’un
travail de l’enseignant avec les élèves ?
face à la grande variété
(hétérogénéité) dans la classe, nécessité d’une variété de décisions possible,
nécessité donc d’organiser la variété au sein de la classe
(loi de la variété requise dans l’analyse des systèmes : cf. Ashby)
déléguer aux élèves,
leur donner des rôles dans la classe, ne
pas faire à leur place
évaluer
c’est communiquer : l’entretien comporte un retour d’informations pour aider
à la prise de décisions (qu’est-ce que je garde ? qu’est-ce que je change,
qu’est-ce que je fais bouger ?)
la dimension collective est
essentielle « on n’enseigne pas tout seul »:.
Même si la visite donne peu accès directement à cette dimension du travail du
stagiaire visité, il est important que le visiteur traite de cette dimension
dans l’entretien en questionnant l’observé sur l’amont et l’aval du cours
pas d’évaluation
si on ne sait pas ce qu’on fait : quand je vais
observer qu’est-ce que je cherche à savoir, comment je prends de l’information ,
comment je la valide ?
dans le schéma autour des deux
axes de la conscience et de la compétence, il est à remarquer que là où la
confiance est dans le croisement de la conscience et de la compétence, la
satisfaction est au croisement de l’inconscience (ou de la non-conscience) et de
l’incompétence.
La vie est faite de
micro-choix , un cours aussi. Apprendre aux élèves à faire des choix
intéressants pour eux et pour les autres …donc leur en ouvrir la possibilité
(cf. Ricoeur sur l’éthique : une vie bonne avec et pour les autres dans des
institutions justes)
Intérêt du passage par le langage métaphorique …avec ce qu’il dégage de
puissance de mobilisation et de signification : le bestiaire a été
particulièrement apprécié de l’enseignant colibri à la panthère rose en passant
par le limier
S’il y a spontanément
résistance par rapport au nouveau et au complexe, malgré tout les
changements sont possibles . Ils supposent une attitude de « prise sur le
réel », être présent dans le monde pour agir sur le monde ; être présent dans sa
classe pour agir dans sa classe. Faire percevoir le mouvement.
Identifier les points d’appui qui permettent de l’accompagner ( de le
précéder ?)
« Moins ça bouge plus ça va
casser » : la tectonique des plaques comme lecture de ce qui se joue parfois
dans la classe, dans l’établissement, dans l’école
la discordance ou la pensée
divergente ne sont pas naturelles , la tendance des « entrants dans le métier »
est plutôt de se mettre en conformité avec le milieu ambiant, de choisir
l’homogénéisation
Enfin la particularité française de penser le prescrit du métier d’enseignant (
source Eurydice) donne à réfléchir ….
(notes prises en intervention auprès de formateurs de l'ISP
Paris, oct. 2005)
L'apprentissage du métier d'enseignant (à lire sur
http://www.inrp.fr/vst/LettreVST/50-janvier-2010.php )
Comment assurer un bon apprentissage du métier enseignant ?
Par une formation sur le tas appuyée par quelques collègues
expérimentés, car ce n'est que sur le terrain que se rencontrent les réalités du
métier ?
Par une solide formation disciplinaire, car on ne peut bien enseigner que ce
qu'on maîtrise bien ?
Les résultats de la recherche montrent pourtant que l'apprentissage du métier
enseignant est loin de se résumer à cette alternative, que le passage des
savoirs académiques et didactiques à la pratique professionnelle et pédagogique
est loin d'être naturel.
On a partout souhaité rapprocher la formation des maîtres de l'université, pour
assurer une base plus scientifique à cette formation et disposer ainsi de
savoirs pour la pratique appuyés sur la recherche.
On a aussi constaté la nécessité d'avoir une contribution des enseignants de
terrain qui apportent leurs savoirs de la pratique.
Les tentatives de standardisation ont montré leurs limites, que ce soit par la
définition de modèles de contenus de formation ou celle d'habiletés techniques
censés répondre à toutes les situations d'enseignement.
Dès lors, les recherches convergent sur l'importance de la présence vivante, à
côté des enseignants-chercheurs, de formateurs à la fois praticiens et
chercheurs, ainsi que de tuteurs qui servent de modèle aux futurs enseignants
tout en entretenant un rapport distancé à l'expérience.
Cela implique que la formation se déroule autant que possible en alternance
intégrative entre le terrain (stages en responsabilité) et l'établissement de
formation (apprentissage des savoirs) afin que le futur enseignant développe une
pratique réflexive qui ne soit pas la succession d'une partie théorique
désincarnée et d'une pratique de terrain sans recul.
L'enjeu est celui de la construction d'une professionnalisé enseignante qui se
compose à la fois de savoirs disciplinaires, de savoirs professionnels, de
compétences et même d'une dimension éthique, culturelle, institutionnelle et
organisationnelle dont on ressent aujourd'hui le besoin plus qu'auparavant.
|
voir aussi:
les
pages très concrètes de Rémi Castérés, Ecole Saint-Didier de Riverie (acad.Lyon)
Former des enseignants débutants qui deviendront des praticiens réflexifs,
article de Philippe Perrenoud, 1996
Petit vocabulaire raisonné à l'usage des enseignants débutants,
IUFM Aix-Marseille
Atelier
présenté lors du colloque « Pour une insertion réussie dans la
profession enseignante : PASSONS À L'ACTION ! » au Centre des congrès de Laval
les 20 et 21 mai 2004. (video)
Destiné aux élèves-professeurs, aux enseignants débutants ,
aux formateurs; ce site permet de suivre la gestion et la préparation de la
classe en articulant théorie et pratique.
http://prepaclasse.ifrance.com
Une enquête du
SNUIPP sur les débutants
une bibliographie sur l'entrée dans le métier,
proposée par l'IUFM Auvergne
Conduire un groupe d'analyse de pratiques, d'après Patrick Robo et
s'abonner à sa liste de diffusion
|
Voir aussi, même en ligne, sur
La version en ligne
;

LE MANUEL DE SURVIE A L'USAGE DE
L'ENSEIGNANT , Prix Louis Cros 2005
Pour
le commander en ligne, clique sur l'image !
4ème éd. 2013

|
Ce livre a reçu en 2005
le PRIX LOUIS CROS.
Créé sous l'égide de l'Académie des Sciences Morales et
Politiques,
ce Prix annuel
récompense une oeuvre dans le domaine de l'éducation et de la formation.
Le
jury apprécie les travaux susceptibles d'éclairer non seulement les
spécialistes mais aussi le grand public sur les enjeux et les défis
contemporains de l'éducation.
Ce
Prix est créé en hommage à Louis CROS, fondateur du Comité Universitaire
d'Information Pédagogique, créateur de l'Institut Pédagogique National (ancêtre
de l'INRP) et des Centres régionaux et départementaux de
documentation pédagogique, président honoraire des Centres d'Entraînement
aux méthodes d'éducation active. Il fut également le premier en France à
qualifier « d'explosion scolaire », un phénomène mondial, à prédire son
ampleur, à analyser sa nature, à discerner sa portée politique, dont Mai
68 devait confirmer l'importance.
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Lettre à un
tuteur ou accompagnateur d’enseignant
André de Peretti
et François Muller – juin 2010
A côté d’une liste
de références et d’ouvrages indiqués aux débutants , et qui sont de nature
à les aider, nous souhaiterions proposer quelques éléments de réflexion
cette fois à l’attention de celles et ceux qui se destinent ou sont
désignés comme tuteur ou encore accompagnateur, formateur
mais aussi directeur pour ces enseignants débutants.
Certains d’entre
vous hésitent à accepter ce rôle de tuteur d’enseignants débutants ; nous
pensons cependant que votre action peut être positive, voire indispensable.
Et nous voudrions attirer votre attention sur un certain nombre d’objectifs,
tout aussi importants pour les débutants que pour vous.
Préparer la
prise de fonction
Il importe
évidemment d’offrir les meilleures chances d’efficacité aux prises de
fonction des nouveaux enseignants, malgré les difficultés pratiques pour
assurer un bon départ à leur développement professionnel dans le cadre
de l’organisation apprenante de notre système scolaire.
Ce
développement professionnel de tous les enseignants, comme l’appellent
nos cousins québécois, nous, Français avons tendance à en réduire la
problématique à la seule « la formation professionnelle »; il s’agit de
se placer non sur la seule répétition de pratiques habituelles ou anciennes,
minimisant la responsabilité professionnelle de chacun des tuteurs et leur
créativité dans l’accompagnement des jeunes ou moins jeunes.
Il s’agit en effet
non seulement de proposer un inventaire des pratiques mais aussi d’affermir
les réflexion d’approfondissement sur le métier au cours d’ échanges
avec les accompagnateurs ; il ne saurait s’agir de proposer aucunement une
simple formation à bon marché concédés aux jeunes débutants.
Sans doute, il
importera à longue échéance d’organiser des initiatives et des recherches
qui permettront de réorganiser de manière plus souple et plus vivante^,
moins « jacobine » et moins « identitaire » , les différents parcours
d’enseignement et de formation offerts ou imposés aux élèves.
Mais en attendant,
pour le présent, il est indispensable d’ organiser la sortie immédiate du
master 2 de jeunes collègues qui n’ont bénéficié d’ aucune formation
professionnelle ni d’éléments concrets de la formation pratique, pour
prendre en responsabilité la conduite d’une ou plusieurs classes, dans des
conditions qui vont poser des problèmes non seulement aux élèves eux-mêmes,
mais aussi à l’école et à l’établissement.
Dans le difficile
changement de scénario actuellement en cours (suppression des IUFM,
disparition de stages d’observation, de modules de formation
professionnelle,), la formation est replacée directement sur le terrain
concret de la classe. Nous sommes donc obligés à penser à de nouveaux
scénarios où la découverte de processus et de procédures d’enseignement par
le débutant demandera le soutien d’échanges avec un tuteur au moins, en
vue de lui permettre des adaptations. Une telle démarche d’expérimentation
, dans la classe, dans l’établissement, implique que le débutant puisse
communiquer ce qu’il constate, ce qui l’intrigue, ce qui l’affecte ; qu’il
puisse réfléchir avec un collègue plus ancien sur un certain nombre de
dispositions à prendre ou d’outils à utiliser. Ces échanges lui
permettront de saisir que son enseignement n’est pas automatique, qu’il
rencontre des phénomènes complexes, qu’il est bon de transformer ces
moments d’expériences en une expérimentation analysée avec l’accompagnement
d’un collègue.
Il doit pouvoir
ressentir qu’il n’est pas laissé seul dans l’indifférence, par les
autres membres du corps enseignant. Cette confrontation analysée et
croisée avec l’un d’entre eux, avec plusieurs d’entre eux, sera essentielle
dans le processus de sa formation professionnelle.
Car un enseignant
débutant peut parfois commencer à enseigner dans un milieu déjà complexe,
compte tenu des catégories d’élèves. Il peut en résulter des difficultés de
relations et un risque de dégradation de l’ambiance de travail. Il est
important d’inverser ces difficultés par un soutien apporté à ce que va être
amené à entreprendre un nouvel enseignant.
Notre propos par
cette lettre est d’analyser les dispositifs qui peuvent prévenir les
risques de situations difficiles ; nous souvenant de ce que Piaget
proposait, donner à chaque personne des chances de réussir pour
comprendre, et non seulement de comprendre pour réussir.
Des
ressources, des outils pour une véritable ingénierie pédagogique
La responsabilité
du tuteur ou accompagnateur est évidemment de faire connaitre au jeune
collègue une gamme d’outillages pratiques et d’instruments didactiques
qui peuvent faciliter son travail auprès de ses élèves , mais aussi
assurer l’organisation des relations dans la classe, en vue de permettre
les progrès des élèves dans une ambiance studieuse pour leur ensemble. Il
appartiendra par la suite de faire expérimenter des instruments
diagnostiques ou réflexifs .
En premier lieu,
il peut être utile de rappeler aux débutants l’opportunité de disposer sous
leur main de mementos ou de check-lists leur permettant de
choisir des possibilités variées d’enseignement ainsi que de prévoir des
adaptations en fonction des questions que pourraient poser les élèves[i].
Il est peut être
également intéressant d’aider tout jeune enseignant à se situer
personnellement par rapport à la variété des pratiques d’enseignement[ii]
, au moins en hypothèse de choix pédagogiques à vérifier et à modifier dans
leur usage.
Les tuteurs
pourraient également renseigner les débutants sur l’utilisation de
moyens audio-visuel et numérique (« Gérer sa classe », « prépaclasse » ;
Cap Canal, CNED) et portfolio numérique pour les élèves, à des fins
d’auto-formation, en les aidant à tenter des expérimentations, pour éviter
une monotonie dans la classe. Quitte à s’en dégager plus tard, voire à se
tester à la création d’autres moyens, pour assurer une variété originale
dans leurs interventions et éviter la monotonie dans leurs classes.
Il importe , qu’au
moins pour assurer ses trois première semaines, le débutant ait suffisamment
préparé ses premières interventions, avec des possibilités de variété, en
sorte de ne pas être pris au dépourvu ; et à cet effet, il lui sera utile
d’avoir essayé de se construire un petit dossier d’enseignement avec des
propositions concrètes qu’il aurait rédigé, des références à utiliser, des
exercices proposables jour après jour, ainsi que des recommandations de
lecture pour ses élèves.
Il serait
également sage que chaque tuteur indique aux débutants d’autres personnes
susceptibles de les aider, notamment des jeunes retraités, des associations[iii]
en dehors de leur établissement (comme
par exemple les ressources du Café pédagogique, le
réseau TED, Aidoprofs, le dispositif
d’ Accompagnement personnalisé à Paris, les AROEVEN, les vidéo et sites des
associations pédagogiques et disciplinaires et autres).
Les
invitations à la réflexion et à l’organisation
Les tuteurs
solliciteraient utilement au cours du temps la réflexion des jeunes
débutants sur ce qu’ils constatent par rapport à leur classe et par rapport
à eux-mêmes. Il peut être utile à l’enseignant de ne pas rester à une
situation d’isolement de lui-même face à des élèves et de chaque élève face
à lui.
Il s’agira d’une
réflexion sur les gestes utiles[iv]
mais aussi sur la nécessaire organisation du travail dans la classe : car
enseigner, c’est organiser les rapports des élèves entre eux, vis-à-vis de
l’enseignant, mais également à l’égard de la discipline.
Il est efficace de
suggérer de prendre appui sur les élèves, de les associer de façon
responsable à leur travail d’acquisition des savoirs de les mettre en
situation de coopération entre eux, soit dans des binômes, soit dans des
trios, soit dans des groupements plus importants autour de leaders, pour
l’atteinte des objectifs que vous leur proposez. Le travail d’organisation
de l a classe doit être envisagé : sera-t-il possible, pour vous,
éventuellement, de mettre des élèves en coopération entre eux dans des
binômes, dans des trios, dans des groupements plus importants,
Il importe que
l’enseignant évite que les élèves ne s’en remettent toujours à son
intervention, mais qu’ils puissent contribuer à la mise au point avec lui
d’informations ou d’idées ; car il lui convient, avec votre conseil,
d’éviter de se laisser isoler dans son rôle de détenteur absolu des savoirs
et dans la création de dépendance, contradictoire avec l’apprentissage
responsable dans les disciplines.
Dans cette
perspective, on peut suggérer qu’après un court exposé, l’enseignant
débutant demande aux élèves de réfléchir par deux, ou par trois, pendant un
temps donné, pour ensuite que de chaque binôme ou trio question ou réponse
soit faite, et que ce ne soit pas simplement le produit de la spontanéité
de certains élèves.
Une organisation,
comme un organisme, doit résulter d’une cohésion par les relations, selon
leurs différences entre les éléments, mais non de leur émiettement. Une
place et un rôle responsable pour chaque élément, pour chaque élève, peut
être progressivement mis en place, établissant une solidarité dans la
classe.
A cet effet,
rappelons qu’il y a une réelle pluralité de rôles possibles auxquels
l’enseignant peut avoir recours pour que l’organisation de classe soit
réellement apprenante,[v], :
il n’y a pas que des délégués élèves qui soient utiles pour la
classe ! Certains élèves peuvent aider à la distribution des documents, à la
gestion du tableau et des affichages, à des recherches en CDI , à dessiner
au tableau, à aider un camarade ou une petite équipe etc… Une classe marche
si des élèves apprennent des autres, avec les autres, pour les autres, comme
par soi et pour soi, et sûrement pas contre les autres.
Nous avons pu
souvent utiliser la métaphore du colibri[vi] ;
cet oiseau au long bec pointu peut retirer des fleurs un nectar sans les
abîmer, tout simplement par une approche sans pression excessive et sans
retrait non moins excessif : alternant présence et distance, comme il se
doit pour l’enseignant vis-à-vis de sa classe et de chaque élève.
Des moments
importants de l’activité du débutant ? l’exemple de l’accueil
Le domaine de
l’accompagnement du tuteur ne se limite pas uniquement à des réflexions
générales, mais peut porter sur des moments importants de la vie scolaire,
notamment l’accueil des élèves ou l’entrée de l’enseignant dans sa
classe.
Est-il utile
qu’il entre après ses élèves, ou avant, ou en même temps ? Avant qu’il
entre, faut-il organiser les tables, selon quel modèle ? Il y a lieu
d’échanger avec leur tuteur sur les manières de « préparer sa classe », et
ici sa salle : dans la disposition des tables, l’habillage des murs, les
affichages obligatoires
ou inattendus.
Sur le plan de
l’accueil, convient-il, au plan de l’établissement, que le débutant entre
seul dans la classe, ou peut-il être introduit par un tuteur ou pour un chef
d’établissement ? Ou non ? La phase de testing, si ce n’est de
bizutage, par les élèves, et par les parents aussi, est réelle. Il peut être
utile d’évoquer de façon favorable, la façon dont l’enseignant va être mis
en position de testing par les élèves des classes où il interviendra,
en évitant toute surprise ou appréhension, toute ironie ou impatience.
Dans la
présentation de l’enseignant, le fait qu’il soit débutant n’est pas
nécessairement à mentionner : il peut suffire qu’il soit présenté comme
« nouveau ». Il est souhaitable bien sûr que chef d’établissement et
collègues fassent attention à ne pas placer le « nouveau » dans une classe
à la réputation déjà sulfureuse.
Que ferez-vous en
ces perspectives et objectifs, tuteurs, au moment de la rentrée scolaire ?
Comment pourriez –vous participer à la phase d’accueil des élèves ?
Eventuellement, peut-on concevoir qu’il y ait pour le débutant et vous un
temps d’accueil des classes qui pourrait durer trois jours ? Pour opérer
l’intégration du débutant à l’équipe enseignante, à son travail, la
participation au devoir collectif de réussir l’accueil et l’installation
symbolique des élèves est efficace.
Un
dispositif solidaire et professionnel de travail
Ce qui est en jeu
dans la relation entre tuteur et accompagné, comme au sein des groupes
d’enseignants, c’est bien la solidarité professionnelle; il sera donc utile
que puissent être partagés des projets communs, des réflexions sur les
problématiques de travail, sur le suivi des élèves, mais aussi sur des
aspects plus cachés du métier : dans certaines écoles, l’équipe enseignante
se donne des temps de « partage des doutes et des difficultés », pour
trouver des solutions, des médiations, des apaisements, quand il le faut.
Cela peut être important avec des débutants.
Dans le cadre de
cette solidarité professionnelle, il faut inclure la présentation aux
débutants des ressources du CDI ou de la BCD à l’école : une réunion entre
débutant et tuteur permettrait de faire repérer au jeune débutant des
ouvrages pratiques pour son enseignement, ainsi que d’analyser avec lui les
ressources existantes pour telle ou telle conduite, en vue d’assurer une
participation en partage aux projets et aux soucis de l’équipe.
Il serait
souhaitable que les débutants soient invités par vos soins de tuteur à
rencontrer d’autres enseignants, à découvrir d’autres disciplines,
d’autres niveaux, de sorte à pouvoir apercevoir d’autres styles
d’enseignement, d’autres ambiances de classes, et ainsi enregistrer des
observations concrètes. Ce travail de connaissance de la mise en application
de savoirs scientifiques par d’autres collègues peut être, pour eux, à la
source de pratiques ou d’innovations adaptées et ajustées.
La solidarité
entre enseignants est d’autant plus nécessaire qu’il s’agit d’évoluer, dans
notre pays, vers un modèle de formation par l’expérience, sans
préparation, soutenue seulement par une observation externe perlée.
Plus que jamais,
il devient nécessaire, en ces circonstances, compte tenu de la rapidité des
évolutions des connaissances, d’ inviter les jeunes débutants à s’intéresser
de prés à l’organisation de l’enseignement et de ses établissements, ainsi
qu’à ses alternatives : à propos des durées de temps, ou sur les espaces,
sur les partenariats entre collègues comme sur les partenariats avec
d’autres instances culturelles, artistiques ou scientifiques à l’extérieur,
sur les convergences, sur les groupements.
Pourquoi ne pas
créer dès le début des phases de regroupement entre deux classes, pas
forcément de même niveau, et mises en sous-groupes, comme cela a été
organisé avec succès de nombreuses fois jusqu’ici dans notre système
scolaire ?
Il faut aussi
penser à intégrer les débutants dans des groupes de travail, voire dans des
groupes d’analyse de pratiques, centrés sur une problématique non seulement
entre pairs, mais aussi avec des anciens (sinon ex-pairs), dans une
formation continuée, dans une co-formation au long cours à promouvoir.
Car il devient
urgent de construire, sans méconnaitre les expériences antérieures, de
nouvelles modalités professionnelles, concernant l’organisation de la
classe, les rôles impartis aux élèves et les solidarités entre tous.
Donner de la
valeur
Les derniers
conseils énoncés viseraient la prudence à pratiquer en évaluation, cela très
tôt dans le travail engagé avec les élèves : éviter d’utiliser le mot de
faute, ne pas mettre des « notations » à chaque instant de la classe,
mais réserver dans l’emploi du temps des moments spécifiques consacrés à
l’évaluation, dans un échange plus apaisé avec les élèves. Il faut aussi
que le débutant prenne attention aux conditions de travail des élèves hors
de la classe, ainsi qu’aux facilités ou non que certains peuvent avoir, non
pour séparer ces élèves, mais pour essayer de les faire s’entraider.
Evaluer c’est bien
étymologiquement, éthiquement, faire sortir les valeurs, c’est aussi
éclaire, alerter, encourager, motiver les élèves. En aucun cas, évaluer ne
se réduirait à sanctionner des erreurs, immoralement taxées de « fautes » :
c'est-à-dire se laisser aller bousculer, à crisper des élèves, à marquer de
la nervosité, à déprimer certains au profit de quelques-uns.
Evaluer, c’est
encore mieux que note : coter des progressions ou des acquisitions faites ou
possibles. C’est offrir des chances adaptées, variées, renouvelées, de
réussite aux efforts et améliorations demandées de façon ajustée à chacun ;
afin que soit préservée, améliorée son image de lui-même.
Chers tuteurs, la
responsabilité qui vous est confiée est à la fois pleine d’intérêt, mais
aussi lourde de difficultés ; elle est indispensable pour le jeune
débutant. Elle suppose en contrepartie une reconnaissance de la part de vos
collègues, mais aussi de la part des responsables de l’Institution
scolaire ; il va de soi que la complexité de la mission qui vous est
impartie suppose que vous soyez vous-mêmes aidés au cours de séminaires qui
pourraient être organisés entre vous, et sans doute avec d’autres collègues
universitaires, en vue de mise au point et de soutien réciproque. Il serait
également utile qu’un certain nombre d’ouvrages pédagogiques et de la
littérature professionnelle soit mis à votre disposition.
Nous vous
renvoyons aux ouvrages que nous avons produits dans le souci d’une
ingénierie de l’enseignement, comme par exemple Mille et une proposition
pour conduire sa classe, Contes et fables pour l’enseignant moderne,
l’Encyclopédie de l’évaluation, ou encore le « Manuel de survie à
l’usage de l’enseignant, même débutant », Prix Louis Cros. Notez
également en ligne les milliers de pages disponibles à partir du site
« diversifier »,
http://francois.muller.free.fr/diversifier/index.htm
Pour terminer,
donnons-nous rendez-vous dans un an dans un colloque entre tuteurs et jeunes
débutants pour faire le point sur ce dispositif. Comme le proposait déjà
André, dans Organiser des formations, p. 187.
[i]
On
pourra consulter par exemple « Check-list pour la préparation et la
conduite d’un enseignement, in Organiser des formations, André de
Peretti, éd. Hachette, 1991, p.114[i] ;
en faisant éventuellement cocher, ce qu’un nouveau collègue, qui lui
parait utile de prendre en compte, dans sa préparation. Il est
important que l’expérience directe du métier ne s’effectue pas sans
repères, ni sans choix marquants.
[iz
Voir Dominique BUCHETON, Le développement des
gestes professionnels dans l'enseignement du français - Un défi pour la
recherche et la formation, éd. De Boeck, 2008 et Christian ALIN, La
Geste Formation, Paris, 2008
[vi]
La métaphore du colibri, Contes et fables pour l’enseignant moderne
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