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Se
centrer sur les apprentissages
Les parcours diversifiés sont une des réponses aux difficultés
d’apprentissage après la difficile mise en place de la pédagogie
différenciée, des thèmes transversaux… L’idée
de différencier est à retenir, mais elle demande un investissement
de l’enseignant. Dans les nombreux établissements représentés,
il y a bien réflexion et projets pour faire autre chose et répondre
en équipe aux difficultés des élèves, mais
ce sont souvent les cadres conceptuels qui font défaut.
L’enquête
menée à partir des projets d’établissement
montre que les équipes s’appuient sur des pratiques existantes et
des réussites validées. L’inflexion actuellement porte plutôt
sur :
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Définir les compétences attendues
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Travailler dans le cadre plus collectif du projet d’établissement
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Ancrer les projets dans le quotidien de la classe grâce à
l’évolution des pratiques
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Analyser les retombées sur les apprentissages disciplinaires
Etude de cas : le collège DELACROIX
(XVIème arr.)
D’abord quelques informations pour situer l’action dans ce collège
qui scolarise 660 élèves dans 24 divisions ; population qualifiée
d’hétérogène avec plus de 20 % d’élèves
étrangers et 25 % comme taux d’orientation vers la seconde professionnelle
en fin de 3ème.
Un « ancrage » de pédagogie inventive, sur l’apprentissage
des media, les pratiques artistiques, l’usage
de l’informatique dans la pédagogie.
L’expérimentation des parcours diversifiés est un point
fort du projet d’établissement, important par l’adhésion
des parents, et qui concourt à un effet « vitrine »
pour le collège, bien utile dans un environnement scolaire de compétition
entre établissements, publics ou privés, de l’Ouest parisien.
Un stage « sur site » en avril-mai 1997, animé par
l’équipe Collège (formation continue de Paris) a contribué
à la diffusion et à la modélisation des projets au
sein du collège.
A la rentrée 1998, à ce point de la « résistible
» expansion des parcours diversifiés au collège Delacroix,
6 projets mis en place en 1997 ont été poursuivis par les
équipes en 4ème, 6 nouveaux projets ont ouvert en 5ème,
les élèves de 6ème attendant leur tour pour choisir
leur parcours de l’an prochain, et l’an prochain, les 3ème seront
des « anciens » des parcours…
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Créer
du lien entre les disciplines
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Discipline
et professeur principal
Pourtant, au collège DELACROIX on note une émergence
paradoxale de la « disciplinarité » : l’animateur de
projet est partout le professeur principal qui organise dans sa classe
une activité dont le thème dominant est une notion forte
dans sa discipline d’exercice. Avec ce maillage des responsabilités,
on enseigne « autrement », mais pas autre chose que le contenu
de sa discipline. Autrement, c’est souvent par un recours au concret pour
mieux faire appréhender l’abstrait.
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Le
parcours est un medium
Puisque le thème est partagé avec au moins un autre enseignant,
l’élève bénéficie d’un apprentissage successif
et cumulatif ; dans le temps scolaire, d’une heure à l’autre, une
notion, un objet, une image, des mots, sont pris et repris dans une vision
différente qui se renouvelle et diversifie le sens. On progresse
par assemblage, comme ce professeur de S.V.T. de 4ème qui fonde
l’observation des cycles météorologiques sur les images des
Très Riches Heures du Duc de Berry que le professeur d’Histoire
a fait découvrir en 5ème comme les traces de l’activité
économique et de l’organisation sociale du Moyen-Age. Cet apprivoisement
de l’encyclopédisme des disciplines se joue pour les enseignants
au gré d’une cooptation par affinité et sympathie. On revendique
qu’un temps de concertation soit payé. On participe au partage équitable
de la D.H.G., même si c’est difficile ; on se rencontre et on se
lie à des collègues, avec ce sentiment de réussir
ensemble une socialisation de l’activité pédagogique jusque
là individualiste. Le « parcours » rassemble, autorise,
le « parcours » est un medium.
L’élève se sent pris dans un réseau d’intervenants,
on s’intéresse à lui à plusieurs. Les parcours sont
la manifestation d’une « pédagogie chaude », le collège
avec ses choix à dominante est une
tribu où progresse l’appartenance identitaire et les élèves
se sentent valorisés et mieux socialisés.
Il n’est pas étonnant que le thème choisi pour le contrat
d’innovation soit « Comment les parcours diversifiés du collège
Delacroix concourent à ce que l’élève ait une meilleure
appréhension de soi, des autres et de son environnement ».
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Le
parcours, le cours par le détour
La pédagogie du détour interroge les participants
et la place du parcours au regard du cours
classique. Le parcours, c’est du cours par le détour. Il n’est
pas le lieu ni le moment d’apprentissages nouveaux ; il est un moment d’apprentissage
et d’enseignement mais « autrement ». Le parcours permet de
mieux redéfinir ce qu’est apprendre
: Philippe PERRENOUD
en donne une version:
une situation mobilisatrice, porteuse de sens, qui provoque une
action dans laquelle l’élève s’implique personnellement et
durablement ; une situation qui ne menace ni son identité ni la
solidarité entre élèves ; enfin une situation qui
se situe dans la zone proximale de développement.
Diversifier une situation,
c’est donc permettre à l’élève d’être confronté
le plus souvent à une situation mobilisatrice. C’est une phase
d’appropriation, d’expérimentation, de confrontation avec ses propres
représentations et en situation, « pour de vrai » disent
les élèves.
Ainsi, le parcours est un moment d’individualisation
de la formation de l’élève, plus maîtrisée,
une sorte de module capitalisable où s’expérimentent les
compétences forcément transversales
de l’élève, car aucune situation n’est à proprement
parler purement disciplinaire. C’est un terrain privilégié
d’observation et de confrontation de
situations complexes, le lieu d’un bilan de compétences.
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Construire
une liaison entre cours et parcours
Etude de cas : le collège Anne
FRANK
La condition initiale a été la
formation des enseignants afin dans un premier temps d’informer,
puis de faire exprimer, lever les résistances,
enfin de penser l’accompagnement de projet. La formation a permis de développer
et d’approfondir certaines compétences actives dans le dispositif
parcours mis en place cette année :
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Savoir repérer pour chaque atelier les savoir spécifiques
en terme de contenus, d’objectifs, de compétences,
de curiosité que cela fait naître.
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Savoir élaborer ensemble des contenus et des méthodes
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Savoir bâtir des contextes d’apprentissage
avec des savoir identifiés et référés aux disciplines.
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Bien maîtriser la notion des liens entre divers enseignements à
l’intérieur de l’atelier
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Savoir animer avec des élèves des
séquences de choix En amont, la pratique de l’éducation
au choix facilite la demande.
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Savoir faire un bilan de compétences avec des élèves
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Une démarche
réaliste
Le rôle du chef d’établissement comme animateur et régulateur
pédagogique est capital
Chaque enseignant, chaque discipline peut et doit y trouver son compte
en terme d’objectifs et de contenus.
Un petit noyau actif de personnes-ressources peut suffire pour initier
le projet. Il ne faut pas maximaliser l’action.
Inclure obligatoirement le temps du parcours dans l’emploi du temps
des élèves (pas plus de 25 h 30) et dans celui des professeurs,
ne pas en faire quelque chose en plus au risque de dévaluer l’action.
Il s’agit bien d’un
recentrage sur les apprentissages scolaires par le détour
pédagogique.
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Faut-il
évaluer ?
En tant que moment d’enseignement, fondé sur des objectifs
de cycle, bâti sur des programmes
de disciplines, le parcours est nécessairement soumis
à évaluation . Il s’agit non pas d’acquérir des
connaissances nouvelles, mais de mesurer les acquisitions des élèves
en terme de méthodes, de savoir-faire, de pratique de la langue,
de contenus liés aux champs disciplinaires concernés. La
logique de diversification touche également les pratiques
de l’évaluation. Le parcours peut se révéler le
lieu et le moment privilégié d’appropriation et de perfectionnement
des compétences de l’élève. Un moment d’évaluation
formative.
D’abord, une évaluation du parcours par la production qui était
son objectif visible et affiché : c’est la forme la plus couramment
employée dans les établissements. Exposition, représentations,
journal, participations, enquête de satisfaction.
Ensuite, évaluer l’activité de l’élève
pendant le parcours et les compétences travaillées plus spécifiquement.
Les réponses sont alors moins nombreuses. Le
collège FAURE a élaboré pour chacun de ses
10 ateliers semestriels un carnet
de compétences individualisées . Il a été
élaboré grâce à un transfert « technologique
» des enseignants de technologie et de S.V.T., plus rodés
à ce mode de travail. Il se compose en trois parties : d’abord,
des compétences transversales, communes à tous les ateliers,
puis des compétences spécifiques à chaque atelier,
enfin une partie laissée à l’élève pour qu’il
puisse y faire figurer ce qu’il estime avoir travaillé. Au regard
de chacune des compétences, deux colonnes, une pour l’élève,
une pour le ou les professeurs du parcours. Ce carnet est joint au bulletin
de février puis de juin.
D’autres établissements ont fait figuré une
ligne « parcours » dans le bulletin trimestriel ; il y
a lieu pour une notation chiffrée et une appréciation.
L’évaluation, sous toutes ses formes possibles, est nécessaire,
en particulier dans l’analyse des retombées dans les cours ; tenter
d’identifier les parts communes, les compétences transversales au
travail à partir d’exigences communes. La concertation est indispensable
entre les professeurs, du fait de l’interdisciplinarité quasi-systématique
dans les parcours et de la prise en compte des apprentissages réalisés
dans les parcours par les enseignants des autres disciplines.
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