Car la
question de l'inefficacité du redoublement ne se pose plus.
De nombreuses études l'attestent. Ainsi T. Troncin établit que " à niveau
initial égal, les élèves faibles qui passent en CE1 progressent mieux que
les élèves faibles qui sont maintenus au CP. Les redoublants de CP vont
progresser la deuxième année, certes, mais restent fragiles dans les
domaines où ils étaient fragiles, et ne rattrapent pas la moyenne de la
classe". Pour D. Meuret, "en règle générale, à l'école et au collège, le
redoublement s'avère peu équitable et inefficace du point de vue des progrès
individuels des élèves. Il affecte négativement la motivation, le sentiment
de performance et les comportements d'apprentissage de ceux-ci et les
stigmatise : à niveau égal en fin de troisième, les élèves « en retard »
obtiennent de moins bonnes notes que les élèves « à l'heure », sont moins
ambitieux que ceux-ci et sont plus souvent orientés en filière
professionnelle. En outre, les comparaisons internationales montrent que le
redoublement est inefficace du point de vue des résultats d'ensemble des
systèmes éducatifs".Pour lui le redoublement ne peut se justifier qu'en
classe d'examen ou dans le cas d'élève momentanément perturbé. En tous cas,
les pays qui n'utilisent pas le redoublement ont souvent de meilleurs
résultats scolaires.
Malgré
tout le redoublement perdure. Il est très
coûteux. Et pourtant ceux –là même qui proclament la chasse aux économies,
ne font rien pour en réduire le poids. Alors même que son efficacité est
contestée, il semble ne pas en être affecté. Comment expliquer ce paradoxe ?
Hugues Drealants (Girsef) a avancé plusieurs hypothèses. Pour lui le
redoublement serait défendu par les enseignants car il permettrait de
"réguler l'ordre dans la classe". Il serait un des derniers
pouvoirs d'une profession qui revendique une certaine autonomie par rapport
au monde extérieur. Il permettrait également d'exercer un tri social,
parfois très tôt.
Il y a
pourtant urgence à le remplacer. Son inefficacité
se lit dans les résultats des enquêtes internationales PISA. Elles montrent
que le score médiocre de la France est du au faible niveau des redoublants.
Entre ces 15% d'élèves très faibles et les autres, plutôt bons, le fossé ne
cesse de se creuser. La faiblesse du système éducatif français c'est qu'il
n'arrive pas à proposer une autre solution à ses élèves.
Le redoublement à l'aune européenne
Le redoublement est une pratique très ancrée dans le système éducatif
français. Même si des études ont pu montrer son caractère nocif, il se
maintient parce qu'il est crédité d'une réduction de l'hétérogénéité des
classes et d'un effet stimulant sur les élèves.
L'étude de Thierry Rocher,
parue dans Education & formations n°78, s'appuie sur les données PISA
pour mettre en parallèle les résultats français et ceux de pays qui ignorent
le redoublement. Le résultat est frappant : "à ceux qui pensent qu'il vaut
mieux maintenir un élève plutôt que de le "noyer" dans la classe supérieure,
un modèle alternatif leur est fourni par les pays qui favorisent le passage
automatique et dans lesquels on n'observe pas plus d'élèves en difficultés…
Les récentes enquêtes internationales montrent que les pays les plus adeptes
de la promotion automatique affichent globalement de bonnes performances".
Que
nous apprennent les évaluations internationales sur le fonctionnement des
systèmes éducatifs ? Une illustration avec la question du redoublement
La revue Education et Formations - Thierry Rocher
- N°78 novembre 2008
Les résultats
des comparaisons internationales de compétences des élèves, telles que
PIRLS ou PISA, se sont largement diffusés au cours des dernières
années. Cependant, d’un point de vue médiatique et politique, ce sont
les palmarès qui retiennent le plus souvent l’attention. Or, ces
classements de pays selon une dimension commune et unique – le score
en mathématiques par exemple – ne constituent pas, en soi, une source
très riche d’informations. La mise en perspective des données
issues des évaluations internationales nécessite un exercice de
comparaison plus fin qu’un simple ordonnancement des pays. Cet article
vise à utiliser et à interpréter les résultats des évaluations
internationales de manière à étudier une politique éducative, en
l’occurrence la pratique du redoublement.
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évaluations internationales sur le fonctionnement des systèmes éducatifs
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