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TICE: efficacité pédagogique ?

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DE L'EFFICACITÉ PÉDAGOGIQUE DES TECHNOLOGIES DE
L'INFORMATION ET DE LA COMMUNICATION

Jean-Pierre ARCHAMBAULT, CNDP Mission Veille technologique et industrielle

Extraits de l'article paru dans le numéro 94 de la Revue de l'EPI avec l'aimable autorisation de la revue Médialog qui avait fait paraître cet article dans son numéro d'avril 1999.

 
Dans le monde entier la demande sociale d'éducation ne cesse de croître. Bon gré mal gré, c'est selon, il faut y répondre. Et l'on pense
naturellement aux technologies de l'information et de la communication (TIC) pour aider à relever le défi. Il est alors question de leur
efficacité pédagogique, non sans ambiguïté. En effet, de quoi parle-t-on au juste ? De la qualité de la formation dispensée ou de la rentabilité des investissements éducatifs ? Bien que ces deux préoccupations ne
s'excluent nullement, elles relèvent cependant de champs distincts de la réflexion. Nous allons les examiner et constater que ni l'évaluation de l'efficacité pédagogique des TIC ni celle de leur efficacité économique ne constituent un préalable au développement de leurs usages dans l'éducation.

UNE PÉDAGOGIE PLUS EFFICACE ?

L'ordinateur, prothèse intellectuelle qui assiste l'enseignant, contribue-t-il à améliorer la qualité des apprentissages ? Son
intégration dans des démarches pédagogiques signifie-t-elle une efficacité accrue par rapport à des méthodes plus anciennes ?
L'importance des investissements humains et matériels nécessaires pour que les ordinateurs fonctionnent au quotidien dans les
établissements scolaires amène parfois certains à " sommer l'informatique " d'administrer la preuve de son efficacité pédagogique,
d'une manière beaucoup plus comminatoire que lors d'une demande analogue adressée à telle ou telle méthode d'apprentissage, fût-elle de la lecture.

Il y a de plus en plus d'ordinateurs dans le système éducatif français (de l'ordre de 500 000 à l'heure actuelle) pour des utilisations
variées et de natures différentes. Les revues spécialisées et grand public abondent de témoignages en ce sens. Même si relativement peu de recherches ont été menées pour connaître l'impact exact des nouvelles technologies sur la pédagogie, quelques convictions se
sont forgées au fil des années. Ainsi, le traitement de texte fournit une aide appréciable à l'apprentissage de l'écriture, Internet motive
les élèves, l'ordinateur favorise à la fois l'individualisation des démarches et le travail collectif... On constate que des usages se
sont imposés, pas toujours ceux auxquels on pensait initialement. Il est permis de supposer que, quelque part, ils ont fait la
démonstration de leur efficacité, dans une espèce de darwinisme pédagogique.

DES QUESTIONS SANS RÉPONSES

L'éducation a des siècles et des siècles derrière elle. Elle a fait ses preuves et continue de les faire chaque jour. D'immenses
savoirs et savoir-faire se sont accumulés. Les apprentissages ont des composantes cognitives, physiologiques, psychologiques et sociales. Mais le fonctionnement du cerveau conserve beaucoup de ses mystères.Les sciences cognitives n'en sont qu'à leurs balbutiements. On ne sait pas trop comment on apprend. Aussi est-il difficile d'apprécier une démarche, de la comparer à une autre, de mesurer des impacts, de rapporter un effet constaté à une cause précise, d'évaluer une action pédagogique particulière, par nature toujours éminemment complexe.

On ne dispose pas encore du recul suffisant pour évaluer l'efficacité des TIC sur la durée. Il n'est pas facile de trouver un nombre
significatif d'établissements qui ont mis en œuvre la même innovation pédagogique pour qu'il soit possible de lui attribuer la totalité
d'améliorations constatées.

Il est également toujours difficile d'apprécier les retombées concrètes d'un stage informatique pour des enseignants. De nombreux paramètres interviennent : qualité de la formation certes, mais aussi conditions matérielles d'utilisation des équipements dans l'établissement (nombre de machines, conditions d'accès, présence ou non de personnes ressources
qui installent, entretiennent les ordinateurs, sécurisent et aident les enseignants...), plus ou moins grande incitation institutionnelle
(présence des TIC dans les programmes officiels, les épreuves des examens et les concours de recrutement).

Pour autant, à la manière des philosophes, le monde éducatif ne cesse de se poser des questions, et l'irruption dans le champ pédagogique d'un nouvel outil n'échappe bien entendu pas à la règle. C'est une
bonne chose, même si l'on sait qu'il n'y a pas nécessairement de réponse. Chaque question en appelle d'autres. L'absence de théorie
globale, d'approche d'ensemble n'empêche pas d'élaborer des solutions locales, de fournir des résultats de portée limitée.

L'acte éducatif est une " coproduction " de l'enseignant et de l'élève. Délicate, son évaluation n'en reste pas moins nécessaire, ne serait-ce que pour d'élémentaires raisons déontologiques. Elle bénéficie sur le long terme, avec les examens scolaires, d'indicateurs fiables des performances du système éducatif dans son ensemble.

UNE ÉDUCATION D'UNE PLUS GRANDE EFFICACITÉ ÉCONOMIQUE ?

Les TIC sont-elles source d'une meilleure productivité et d'une efficacité plus grande du système éducatif ? Peuvent-elles contribuer
à la réussite d'un enseignement de masse qui vise à l'excellence pour tous ?

Nous ferons deux remarques préalables. D'abord, les outils de mesure du taylorisme sont inadaptés aux activités de service et à
l'enseignement en particulier. Il est révolu le temps béni des statisticiens que fut celui de la grande production industrielle !
Il était alors facile de mesurer les gains de productivité résultant de l'introduction d'un outil ou de l'adoption d'une méthode. Tant de
tonnes de charbon en plus, cela ne souffre aucune contestation. Mais il en va autrement avec les métiers qui recèlent de plus en plus
d'immatériel et de matière grise. Prenons le cas d'un chirurgien qui utilise des appareillages sophistiqués représentant des investissements importants. Comment déterminer ses gains de productivité ? Par rapport au nombre d'opérations réalisées ? D'opérations réussies ? D'opérations difficiles réussies ?

D'une manière générale, et dans bien des cas, il n'y a pas d'avantages financiers pour l'employeur. Mais les besoins des usagers, des malades, des élèves, de la société sont mieux pris en compte. Il faut donc élaborer de nouveaux outils conceptuels pour mesurer les progrès accomplis.

Ensuite, les choix afférents à l'ampleur de l'investissement éducatif que consent une société sont éminemment politiques. La matière grise joue un rôle de plus en plus grand dans tous les champs de l'activité humaine. En conséquence, la scolarité s'allonge, chacun apprend tout au long de sa vie, et les dépenses d'éducation augmentent. Cette croissance va se poursuivre et l'on doit analyser cette tendance comme un signe de bonne santé pour une société 3. Il est parfois curieux de voir certains se réjouir quand les dépenses de téléphones portables progressent de 50 % et se plaindre quand celles d'éducation augmentent de 3 % ! (..)

DES MESURES DE RENTABILITÉ

Dans un premier temps, l'introduction des TIC représente des coûts fixes nouveaux, indépendants du nombre d'élèves. Ainsi ceux
correspondant à la conception et à la réalisation de logiciels. Modeste dans les systèmes traditionnels, l'investissement dans les matériels et les documents pédagogiques devient aujourd'hui un poste important. Il faut produire ou acquérir les documents, les dupliquer (les documents numériques se caractérisent par leurs coûts minimes), les diffuser. Les coûts de gestion et de structure croissent par paliers. Les coûts variables correspondant aux ressources humaines et au fonctionnement sont grosso modo proportionnels aux effectifs. Le recours aux TIC ne devient rentable que lorsque des seuils d'élèves ou d'étudiants sont franchis.

Des mesures ont été faites, comparant les résultats à des examens communs d'étudiants préparant leurs diplômes soit dans une université traditionnelle, soit à distance. Le bilan est nuancé. Les coûts de l'enseignement à distance sont moindres. Et donc, même lorsqu'il donne des résultats inférieurs à l'enseignement classique, il peut se justifier si l'on veut toucher des publics larges que l'on ne peut pas regrouper (cas de certains pays). L'utilisation des TIC dans la classe, elle, contribue à la qualité de l'enseignement, mais d'une manière non linéaire, un surcroît d'efficacité coûtant relativement plus cher.

AVEC PRAGMATISME ET DISCERNEMENT ?

Nonobstant la difficulté intrinsèque d'une mesure de l'apport des TIC, de l'établissement de la preuve que leur utilisation par des
élèves leur procure tel ou tel avantage dans une situation éducative donnée par rapport à d'autres qui n'en ont pas bénéficié, il existe
plus que de fortes présomptions sur leur intérêt pédagogique réel. Mais cela ne signifie nullement qu'il faille renoncer à l'observation
et à l'évaluation des usages, bien au contraire. Il y a de plus en plus d'ordinateurs dans une École qui se doit d'être de mieux en mieux
en phase avec la société. Les conditions continuent à se mettre en place pour que les enseignants, pour des impératifs de culture générale, de citoyenneté, de formation professionnelle et d'évolution des disciplines, utilisent les TIC dans leur pratique professionnelle
quotidienne. Avec pragmatisme et discernement, c'est la loi du genre pédagogique.
     
 

concept :François Muller @ 1998-2009

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