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autoévaluation

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Dérives possibles de l'évaluation formative

"Toute différenciation de l'enseignement appelle une évaluation formative, autrement dit une évaluation censée aider l'élève à apprendre. Sa conception reste très largement prisonnière de l'évaluation scolaire traditionnelle: 
 
  • on accorde la priorité aux évaluations-bilans, alors que bien d'autres observations seraient pertinentes pour comprendre ce qui empêche ou ralentit l'apprentissage: interprétation des normes et du métier d'élève, méthodes de travail et d'apprentissage, rapport au savoir, identité et projet personnel, relations aux autres élèves et aux professeurs, conditions de vie, environnement familial, itinéraire de formation
  • On s'obstine à standardiser les évaluations formatives sur le modèle de l'équité formelle, qui ne convient qu'aux examens et aux procédures certificatives; on surcharge de tests critériés des élèves dont on voit, à l'œil nu, qu'ils progressent normalement, alors qu'on ne trouve pas le temps d'établir les diagnostics pointus et individualisés qui seraient indispensables pour intervenir judicieusement auprès des élèves en grandes difficultés.
  • On s'enferre dans un perfectionnisme et un formalisme tellement lourds que les enseignants ploient sous la charge et finissent par abandonner l'idée même qu'une quelconque évaluation formative soit possible.
  • On continue à faire coexister une évaluation formative qui exige la confiance et la coopération des apprenants et une évaluation sommative ou certificative qui les replace dans le jeu traditionnel du chat et de la souris, sans avoir le courage de différer fortement les décisions de certifications ou de sélection.
  • On s'arrête au diagnostic, on analyse les erreurs, mais sans lier immédiatement l'évaluation à des tentatives de régulation, dans un processus dynamique et interactif
  • On développe des pratiques d'auto-évaluation qui entraînent souvent à intérioriser le jugement du maître plutôt qu'à développer chez l'apprenant des capacités de métacognition et de régulation de ses processus d'apprentissage et de production, dans le sens d'une évaluation formatrice (Nunziati, 1990)

Avec d'autres, j'ai défendu le principe d'approche pragmatique de l'évaluation formative, entièrement ordonnée au souci de la régulation, ou plus exactement de l'autorégulation des apprentissages. Il importe également de ne pas séparer l'évaluation de la didactique et de parier sur des situations d'apprentissage stimulant l'autorégulation. "

Ph. PERRENOUD, La pédagogie différenciée, ESF, p. 48

Voir aussi: Quelques discordances repérées dans les pratiques d'évaluation

 

Pour évaluer des compétences, il ne faut pas poser une question de connaissance, il faut créer une tâche complexe et voir si les gens arrivent à se la représenter, à y entrer et à la réussir en mobilisant des connaissances. La meilleure chose à faire pour cela c’est d’intégrer l’évaluation au travail quotidien d’une classe. Évaluer des compétences, c’est observer des élèves au travail et porter un jugement sur les compétences en train de se construire : certains sont très loin du compte, alors que pour d’autres, la construction est en cours, même s’il y a encore des progrès à faire. On peut documenter des observations, les engranger, les noter méthodiquement et faire une sorte de " bilan de compétences ", comme on le fait dans les centres pour adultes, avec des outils, mais sans volonté de standardiser les procédures et d’évaluer tout le monde à date fixe.

S’il faut armer le regard des enseignants, c’est pour qu’ils sachent observer les compétences mises en œuvre. Pour cela, ils doivent disposer d’un certain nombre d’outils conceptuels, de modèles théoriques de l’apprentissage ancrés dans la didactique des disciplines en cause aussi bien que de concepts plus transversaux : statut de l'erreur, style cognitif, régulation, obstacle, explicitation, métacognition, etc. Il ne s’agit pas forcément de listes d’items à cocher, mais d’une grille de lecture des observables, dans la tête de l’enseignant.

Construire des compétences, tout un programme !, Entrevue avec Philippe Perrenoud, Propos recueillis par Luce Brossard pour Vie Pédagogique

 

Pour une pratique raisonnée de l'évaluation formative

Ph. PERRENOUD, Construire des compétences dès l'école, ESF, Paris, pp.87-88
 
"Une évaluation à travers des situations de résolution de problèmes, ne peut passer que par l'observation individualisée d'une pratique, dans le cadre d'une tâche.

Le professeur a intérêt à renoncer radicalement à se servir de l'évaluation comme moyen de pression et de marchandage. Toute "rechute" provoque une régression de la confiance, sans laquelle on ne peut apprendre en travaillant ensemble sur les mêmes obstacles.

Maîtriser l'observation formative en situation et la connecter à des formes de feed-back, à la fois immédiatement utilisables et facteurs d'apprentissage, selon l'adage " mieux vaut enseigner à pêcher que de donner un poisson". La proximité provoque la tentation permanente d'aider l'apprenant à réussir, alors que c'est apprendre qu'il s'agit.

Accepter les performances et compétences collectives, cesser de vouloir calculer la contribution individuelle de chacun dans un esprit de justice ou de contrôle, et ne le faire que pour identifier des difficultés spécifiques, parfois masquées par le fonctionnement collectif.

Renoncer à standardiser l'évaluation, à s'abriter derrière une équité purement formelle, exiger et s'accorder à soi-même la confiance voulue pour établir un bilan de compétences fondé sur un jugement expert plutôt que sur un barême...

Savoir créer des situations d'évaluation certificative ou des moments de certification dans des situations plus larges.

Savoir et vouloir impliquer les apprenants dans l'évaluation de leurs compétences, en explicitant et débattant les objectifs et les critères, en favorisant l'évaluation mutuelle, les bilans de savoirs, l'auto-évaluation.

     
 Comment faire ? • la place du prof • Rolland VIAU • autoévaluation
(d'après un article de Michèle GENTHON, Cahiers pédagogiques, n°304, p.82) Dans quelle mesure l'évaluation formative est-elle objet de transfert pour les élèves ? 

Un test sur deux classes de 2ème de lycée a été menée tout au long d'une année scolaire. A l'issue de l'année, une évaluation, la même, a été distribuée aux élèves des deux classes, seule différence: un document d'accompagnement avec critères de réussite et procédures d'auto-évaluation.

 

 

Quels ont été les résultats des groupes ? 

Classez les groupes par résultats moyens croissants:

Classe

A

Pédagogie et évaluation classique

Classe

B

Pédagogie différenciée et évaluation formative

Test  1 

d'évaluation classique

A1

B1

Test 2 

d'évaluation avec critères de réussite et dispositif d'auto-évaluation

A2

B2

solution:

A1 < A2 < B1 < B2

Pas de surprise sur la place de A1 ni sur celle de B2. Les résultats sont conformes aux hypothèses de travail.

En revanche, la formule A2 < B1 montre bien :

  • qu'un groupe d'élèves formés à l'évaluation formative  est capable de plus grandes performances en situation "classique". Le transfert de la compétence réflexive est réel.
  • qu'un outillage de type formatif est de toute façon utile pour tout élève pour le faire progresser dans son évaluation (groupe A2)
 

Voir aussi: 

 

concept :François Muller @ 1998-2009

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