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I Chap7 - Découvrir les modalités du travail en équipe et en groupe

extrait de "Voyage au centre de l’Enseignement", Exploration méthodique de ressources  et de points d’appui

indispensables à l’accomplissement du métier d’enseignant, André de Peretti et François Muller - éd. ESF, Paris, 2008

 
 
 

 

Deuxième partie - Ressources et points d’appui professionnels de l'enseignant

Chapitre 7 – Où on découvre comment organiser le travail en équipes et en groupes de façon variée

 

 

Où le lecteur comprend que si les élèves ne sont pas organisés dans chaque classe comme de petites sociétés, des risques de désordre à la Panurge, selon la vie animalière, en troupeaux !,  s’avèrent élevés ; en douteriez-vous ?  Le commencement de toute société humaine n’apparaît que s’il y a une répartition de fonctions, de liens et de responsabilités dans un groupe.

 

Dans les établissements d’enseignement, chaque classe d’élèves doit donc fonctionner comme un embryon de société, imbriquant les élèves dans une relation responsable avec chaque enseignant. Il est à cet effet indispensable de ne pas laisser les élèves dans une classe, réduits à leur narcissisme ou à leurs rivalités.. Il importe plutôt de les mettre dans des structures de relation coopérative aussi bien entre eux que vis-à-vis de l’enseignant lui-même.

 

Enseignement, équipes et rôles

 

Cette perspective s’impose, que l’effectif de la classe oscille entre 10 et 40 (voire plus) élèves,  L’organisation du travail en chaque classe incline à établir avec les élèves leur répartition en petits groupes ou équipes, susceptibles eux-mêmes d’une petite organisation interne de rôles responsables :  indispensable pour leur effet d’acculturation persévérante.

 

Car, rappelait Jacob MORENO : « Les aspects saisissables de ce qu’on appelle le « Moi » apparaissent dans les rôles où il est opéré. C’est par les rôles et les relations entre les divers rôles que se révèle le mieux une certaine forme de culture.[1] »

 

Là encore, il ne se présente pas une seule forme ou quelques rares formes d’organisation éducative et culturelle qu’ils soient possibles et utiles. Mais une variété d’organisation en sous-groupes est et peut être largement développée. Elle mérite d’être reprise et poursuivie par vos initiatives.

 

Notre intention cependant n’est pas de conseiller telle ou telle configuration, mais bien d’inviter tout lecteur à varier les modes de groupements, en ajustement à ses propres objectifs, aux temps du travail, aux âges et eu égard aux récents progrès de la psychologie cognitive.

 

L’éventail des possibilités est assez développé pour qu’en une année vous puissiez en bonne humeur vous réserver l’opportunité d’en tester quelques-unes. Nous vous engageons dans la foulée à prendre, incidemment des avis de vos élèves (voir le chapitre sur les « 10 dernières minutes ») ; vous serez toujours surpris par leurs suggestions et appréciations.

 

Nous vous invitons de nouveau à cocher les modes d’organisation, qui au fil de vos lectures vous apparaîtront utiles et propres à être mises en application par vous. « Ne glissez pas, mortels » sur nos simples évocations.

 

Nous allons donc exposer,  pour soutenir hardiment,  votre réflexion, une variété potentielle d’organisation des sous-groupes et d’équipes : en leur attribuant soit des fonctions égales, soit des fonctions différenciées. Et dans chacune de ces grandes catégories, nous vous proposerons quelques organisations répartissant les élèves dans les sous-groupes : en rôles égaux, différenciés ou instrumentés.

 

Pratiques, à titre d’exemples

 

Mais pour anticiper la présentation des organisations possibles dans une classe, nous vous soumettons un premier exemple d’ une pratique, expérimentée avec succès, dans un lycée réputé pour la violence de ses élèves, une professeure de français mit au point l’organisation suivante pour sa discipline : dans sa classe de 33 élèves difficiles, elle demanda, deux semaines après la rentrée, à 8 élèves qu’elle avait remarqués s’ils consentaient à être responsables du travail d’une équipe de 4 élèves (dont une de 5). Après leur accord, elle mit en place avec eux et leurs camarades huit équipes. Mais elle eut l’idée de demander aussitôt que dans chacune d’elle, chaque autre élève ait un rôle, selon leur entente et leur choix : soit de responsable de la coopération et du climat de l’équipe ; soit de conteur (ou compteur) des succès des camarades de l’équipe ; soit pour les moins avancés,  de responsable du matériel utile au travail de l’équipe (crayons, gommes, papier, livres etc…). Elle prit soin en outre d’afficher au tableau la liste d’une douzaine d’autres rôles destinés à faciliter les relations de la classe et des élèves avec l’extérieur et pour lesquels elle demanda des volontaires[2].

Comme on le voit, une telle organisation pouvait s’étendre sur un trimestre, ou sur une année.

 

Un autre exemple de pratique, est celle d’une organisation de la classe en équipes réunissant  six élèves, dont l’un d’eux assure un rôle d’interrogation de ses camarades, et dont un autre en sera le porte-parole.

 L’enseignant peut, devant ses équipes, alterner des phases d’enseignement magistral, des phases de leur travail en équipes, et des phases de mise en commun.  Une telle structure a été pratiquée avec efficacité aux Etats-Unis

 

On peut aussi rappeler qu’il y a eu des organisations d’équipes d’élèves ayant à produire une prestation et récompensées par des jurys professionnels. Ainsi, dans de multiples collèges, des élèves de 6ème ont été regroupés en équipes, avec des élèves de 3ème volontaires. Dans tous ces collèges, tous les élèves de 3ème se portèrent volontaires et ce fut avec profit pour eux et pour les petits camarades. Mais il peut être favorable d’organiser des regroupements différenciés entre des élèves de niveau différent et de classes diverses sur certaines disciplines.

 

On peut encore rappeler l’utilité de concours, entre des classes d’établissement différents, qui furent proposés par de grandes entreprises et des départements ministériels. Les classes s’organisent alors en équipes coordonnées et elles produisaient un objet (par exemple,une moto, un livre….. etc) ou un projet (une  « griffe » pour des vêtements orignaux).

 

Ces prestations étaient jugées selon leur valeur et récompensés des jurys[3].

 

 

Revenons aux généralités temporelles

 

La répartition en sous-groupes peut être institué dès le début du cours et pour toute sa durée ; ou bien à un moment donné et pour une partie du temps ; cette répartition peut avoir été faite au début de l’année ; elle peut être renouvelée et changée en cours d’année.

 

En ce qui concerne les durées des travaux en équipes dans la classe, on pourra utiliser des procédures d’un recours bref des échanges en sous-groupes, ou bien à des durées allongées. Si on désigne par M le nombre de minutes consacrées à l’activité d’échanges,  et E le nombre d’élèves dans les sous-groupes, le sigle ME peut indiquer un temps de M minutes de travail entre E élèves : M pouvant aller de 4 à 6 minutes jusqu’à 20 ou 30 minutes ; de même que E pouvant aller de 2 à 6 élèves au choix de l’enseignant entre 4x4 et 6x6..

 

Après ces préliminaires, nous allons donc exposer pour votre réflexion la variété potentielle d’organisation des sous-groupes et d’équipes, en leur attribuant soit des fonctions égales, soit des fonctions différenciées. Et dans chacune de ces grandes catégories, nous vous proposerons quelques organisations des élèves dans les sous-groupes : en rôles égaux, différenciés ou instrumentés. Sera—ce convaincant pour expliciter votre liberté d’organisation créative[4]

 

Les sous-groupes d’élèves peuvent comporter deux individus (nous les appellerons binômes), trois élèves (par exemple, des triades), soit encore quatre ou six élèves (équipes). Ils peuvent être placés dans des dispositifs où les équipes effectueront des tâches identiques ou différentes selon des consignes égales, ou complémentaires,  en matière d’objectifs, de thèmes, de productions et de durée.

 

Dans ces perspectives, l’enseignant peut opter entre deux familles de dispositifs de travail. Dans ces dispositifs, le travail des équipes peut s’effectuer avec fonctions égales ou différenciées et avec des moyens divers.

 

 

I- EQUIPES OU SOUS-GROUPES A FONCTIONS EGALES

 

 

1- Equipes Avec des fonctions égales entre élèves

 

L’enseignant peut organiser un dispositif de travail en groupes à fonctions égales, c'est-à-dire en leur attribuant  mêmes tâches, mêmes thèmes, mêmes consignes en matière d’objectifs de production et durée.

2-Equipes avec fonctions  différenciées confiées aux élèves

Le professeur, tout en maintenant le parti de sous-groupes ou équipes  à fonctionnement égal, peut envisager un enrichissement de ceux-ci en attribuant des rôles différenciés à des élèves dans les équipes, de sorte à jouer sur les interactions entre ceux-ci. Nous pouvons ici proposer encore quatre configurations.


 

Nous avons jusqu’ici présenté des organisations d’échange et de discussion sans recours à des moyens particuliers, mais il peut être opportun, et utile à l’enseignant de s’appuyer sur une ingénierie pédagogique.

3- Organisation de la classe avec des  moyens développés

S’engager dans un travail de groupe sollicite de la part de l’enseignant une capacité à s’appuyer sur une ingénierie pédagogique certaine, que l’enseignant sait utiliser par ailleurs dans une configuration plus classique. Mais il est évidemment important qu’il puisse recourir aux moyens actuels, mis à disposition dans les établissements. 

C’est même une chance : pour l’enseignant d’approfondir certains aspects du « matériel » à sa disposition  et  d’élargir ses instruments et outils , ses recherches ; c’est en même temps une possibilité pour les élèves d’avoir accès à des supports souvent inédits.

A la variété des organisations en sous-groupes fonctionnant de façon identique, peut s’adjoindre la variété des mises en équipes travaillant en fonctionnement différencié.

II-                A FONCTIONS DIFFERENCIEES

Il est possible d’aller plus loin et  l’enseignant est tout à fait à même d’envisager un fonctionnement de classe plus complexe, en organisant des sous-groupes à fonctionnement différencié, et en proposant alors des tâches, des thèmes et des consignes tout aussi diversifiées.

Une telle organisation peut se faire en répartissant des rôles identiques ou différents aux élèves dans les sous-groupes ou équipes. A l’expérience, sa mise en œuvre s’avère aisée et productive.

1- Equipes avec fonctions égales (des élèves de chaque sous-groupe)

2- Equipes avec fonctions différenciées

Ici, sont abordées des organisations plus élaborées, utiles pour des classes nombreuses, ou des regroupements de classes. L’enseignant doit accepter ce qu’il peut prendre comme une prise de risque et une certaine perte de maîtrise, c'est-à-dire de réactivité et d’ajustement de son guidage : d’emblée, c’est bien le groupe tout entier, lui compris, qui est en situation d’apprentissage. En cela, c’est un facteur de réussite.

3- Avec moyens projectifs

La mise au travail des élèves en équipes est un dispositif approprié pour démultiplier les réflexions et la créativité, parfois difficile en classe du fait du plus grand nombre. En équipe, les interactions sont à la fois nombreuses et plus riches, les possibilités d’expression personnelle plus importantes. De ce fait, il peut être utile de recourir à trois dispositifs de travail invitant à la prospective, c'est-à-dire à une imagination d’une donnée à définir dans l’avenir.


[1] J. MORENO, Fondements de la sociométrie, éd. PUF, 1964,p. 29 :l’auteur assure, même page : « Ce ne sont pas les rôles qui émergent du Moi, mais le Moi qui peut émerger des rôles. »

[2] Cf. André de Peretti, Pour l’honneur de l’Ecole, éd.  Hachette, 2000, p .300 ; on trouvera plus loin une variété des rôles de relation vers l’extérieur au chapitre 9

[3] Voir notamment les concours actuels proposés par l’ADEME, la RATP etc…

[4] Pour une présentation plus détaillée, vous pouvez vous référer à A.de PERETTI, Techniques pour communiquer, éd. Hachette, 1994, pp .39-56,cf. également, id. Organiser des formations, p. 221 et 227.

[1] Vous pouvez retrouver une page détaillant la démarche sur http://francois.muller.free.fr/diversifier/la_communication_rotative.htm ; elle est extraite de André de Peretti, Techniques pour communiquer, éd. Hachette, p.47 sq.

[1] Cette façon de faire nous avait été demandée, au cours d’une formation de professeurs de mathématiques en Haïti. Elle s’avéra féconde dans son application aux élèves.

[32] Le site de référence est http://www.photolangage.com , complété de quelques exemples développés en formation sur http://innovalo.scola.ac-paris.fr/former/equipe/outils/photolangage/index.htm

[33] Des vidéos d’élèves en situation d’autoscopie sont visibles sur le site du lycée hôtelier de Paris, mais aussi dans un collège « ambition réussite » de Paris, le collège Utrillo. Sur http://innovalo.scola.ac-paris.fr

Pour aller plus loin sur ce dispositif de travail, se reporter à http://p7app.geneve.ch:8007/f30405/article.php3?id_article=36

[34] Ainsi que l’avait défini Bloom dans son échelle taxonomique  Pour plus de précision sur cette échelle d’objectifs, voir http://parcours-diversifies.scola.ac-paris.fr/PERETTI/taxonomi1.htm

[35] Voir Patrick CLERC,directeur de l’Ecole des Bourseault, , une école différente, CDDP 95, 2005,  Et le site de l’Ecole http://www.aeob.net/Accueil.htm

[36] Un colloque interuniversitaire sur « le métier d’enseignant et l’analyse de pratiques » s’est déroulé les 20 et 21 mai 2005, à l’Université de Reims. La pratique du GAP et son extension ont été étudiées en ateliers et en séance plénière.S

[37] Une fiche technique est disponible sur http://francois.muller.free.fr/diversifier/le_jmt.htm ; voir aussi un exemple de pratique lors d’un séminaire consacré au thème « travailler avec des élèves » ; est alors proposée une « table de transposition » riche et foisonnante en ligne, sur http://innovalo.scola.ac-paris.fr/ACTUALITES/transposition.htm

 

 
Table des matières

Avant-propos

introduction: où le lecteur découvre la navigation

conclusion: retour vers la Lumière





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