I
-
1 - L’AUTONOMIE DE L’ETABLISSEMENT
Un
cadre réglementaire
La
réglementation définit le cadre de l’autonomie éducative et
pédagogique de l’établissement
public local d’ enseignement ( article 2 du décret d’août 1985
modifié par les décrets du
31/10/1990 et du 26/03/1993) et les caractéristiques du projet d’établissement.
Les
critères d’un établissement autonome
L'établissement
doté d'une autonomie élargie, dans le cadre des orientations
nationales définies par la loi, sera
en capacité de :
-
connaître les objectifs que le ministère lui a assignés,
-
définir des objectifs qui lui sont propres, c’est à dire d’élaborer
une stratégie par rapport à une
situation et un environnement locaux,
-
d’articuler ses choix avec les objectifs nationaux et régionaux,
-
de les évaluer,
-
d’en rendre compte.
Les
obstacles à l’autonomie des établissements
1)
L’administration ne donne pas toujours à l’établissement les
moyens de son autonomie
-
des pressions diverses sur la politique de l’établissement ( des
administrations centrale, rectorale et
départementale) : la succession des
circulaires
demandant d’ouvrir « un volet supplémentaire » au projet d’établissement
en fonction des desiderata hiérarchiques.
-
Manque de souplesse dans la dotation globale horaire : des moyens
destinés à aider les élèves
pré-affectés (exemple : l’aide individualisée avec des
disciplines décidées au niveau national)
-
Dotation globale horaire insuffisante pour apporter une marge de manœuvre.
-
La nomenclature des « activités à responsabilités dans l’établissement
» telle qu’elle existe dans les systèmes d’information entre les
établissements,
les rectorats et le ministère (GEP) ne permet pas de reconnaître
certaines activités de l’enseignant.
-
La difficulté de trouver rapidement un conseil juridique en cas de
besoin
-
Le contrôle a posteriori encore trop peu en vigueur.
2)
L’établissement n’occupe pas toujours l’espace d’autonomie qui
lui revient
-
les compétences et la formation des personnels, en particulier enseignant
et de direction, ne permettent pas de libérer la créativité et les
initiatives.
-
peu de connaissances juridiques pour contractualiser
-
le service actuellement défini des enseignants qui ne reconnaît pas
des tâches nouvelles (tuteur, coordonnateur
d’équipe, chef de projet, etc.)
-
la culture de l’évaluation peu développée: l’obligation de
rapport annuel d’activités n’est
pas assurée par tous les établissements.
2
- LE PROJET, UN ELEMENT MOTEUR POUR L’AUTONOMIE DE L’ETABLISSEMENT
1)
le projet d’établissement : en panne
Force
est de constater que cette démarche n’a pas connu le développement
souhaité. Deux raisons en sont à l’origine.
D’une part le projet s’est rapidement transformé en une simple
procédure administrative, s’ajoutant à d’autres, sans réflexion
ni engagement. La
notion
de volets, de cadre préétabli en ont le plus souvent fait un programme
d’actions (au mieux) ou un
catalogue fourre-tout (au pire).
D’autre
part l’ambiguïté et la confusion entretenues autour des notions de
projet (projet d’action, projet
éducatif, projet pédagogique, projet culturel…). Dans beaucoup de
cas, le projet d’établissement n’est qu’un
PAE (Projet d'action éducative) amélioré ou une enveloppe
d’actions hétéroclites décidées davantage en fonction de crédits
à dépenser ou de subventions
obtenues que d’une vision de transformation. Rares sont les
véritables projets politiques,
véritable définition du projet d’établissement. Rares sont
également les projets
d'établissement qui prennent en compte (au moins) les éléments du
contexte environnant existants dans
des projets établis sur le territoire concerné : projets de zone,
projets de quartier, projet éducatif local,
grand projet de ville…
2)
Pas de projet sans autonomie, pas d’autonomie sans pédagogie de l’autonomie
Cela
ne pourra se faire sans le développement de l’autonomie des acteurs
qui participeront à l’élaboration,
la mise en œuvre, l’évaluation de la politique de l’établissement
: pas
d’autonomie sans pédagogie de l’autonomie.
-
Un pilotage temporel
Les
établissements doivent intégrer la notion de temps, autrement vécu
que comme une routine :
-
du temps pour que les notions de politique et de collectif fassent
progressivement leur chemin dans les
esprits ;
-
du temps institué pour que les acteurs puissent se rencontrer,
échanger , s’informer, s’approprier
les informations (temps de concertation institué
dans les emplois du temps, journées banalisées pour la réflexion…)
-
Une culture de l’évaluation
-
Développement des capacités à analyser la situation de l’établissement,
à recueillir des informations sur
les points faibles et les leviers du systèmes
-
Travail de formalisation puis de communication dans l’établissement
de telle sorte que les données
soient accessibles matériellement et intellectuellement
-
Recherche de la confrontation avec un regard extérieur
-
Evaluation des chefs d'établissement
-
Une lettre de mission au chef d'établissement nouvellement nommé et
après renouvellement
-
Des objectifs de changement et de nouvelles tâches et fonctions dans l’établissement
: des négociations à conduire.
La
volonté de concevoir des choix, et de construire de manière
participative une stratégie de
changement est seule susceptible de progressivement faire émerger la
nécessité de tâches et de
compétences à développer :
-
la médiation, la négociation, la transaction en vue d’un compromis
;
-
l’animation
-
la capacité à travailler avec les autres, en particulier dans le
cadre d’une équipe ;
-
la délégation
-
le travail en réseau.
3)
Entrer dans une démarche de projet et acquérir les compétences
nécessaires à sa maîtrise :
quelle aide pour les établissements ?
1)
Les missions et les objectifs nationaux clairement définis, appuyés
fortement par un débat politique et
relayés au plus près possible du terrain ;
2)
La redéfinition des statuts et des rôles, ainsi que celle des
services, adaptés à un nouvel
exercice du métier :
-
Chefs d’établissement
-
Inspecteurs
-
Enseignants
-
Gestionnaires
-
Personnels atoss
3)
L’aide à la professionnalisation
-
accompagnement
-
formation initiale et continue
-
réseaux d’échanges
-
appui méthodologique : en particulier, une aide juridique à l’élaboration
d’un diagnostic, disponible
rapidement et au plus près du terrain.
4)
Un appui logistique
-
assouplissement de la mise en œuvre de la dotation globale horaire
(intégration possible de tâches non
reconnues par l’administration)
-
Dotation horaire assouplie et abondée de telle sorte que les établissements
puissent disposer d’au moins 10% de la masse horaire pour une
réelle marge de manœuvre.
5)
Le rôle des bassins de formation doit être renforcé dans le sens :
-
de l’articulation entre les objectifs académiques et ceux de l’établissement,
par le biais d’une présence active de l’inspection
"générale" et pas uniquement
disciplinaire.
-
du recensement des ressources humaines existantes mutualisées par les
établissements.
-
d’une coordination des politiques éducatives locales, en
articulation et cohérence avec
celles des collectivités.
Se
pose alors la question de la légitimité et de la reconnaissance de
ces coordinations ainsi que les
moyens correspondants.
-
3 - LA CONTRACTUALISATION
Les
contrats de réussite instaurés au niveau des Réseaux d'Education
Prioritaire (REP) préfigurent ce
type de démarche. Cette procédure de contrats d'objectifs devrait
être généralisée. Elle donnerait son
sens véritable au projet, responsabiliserait autant les acteurs
que les instances de décision, comme les conseils d'administration ou
d'école. Elle accorderait surtout
aux acteurs la liberté de mettre en place des processus (missions
et services des personnels, enseignements
complémentaires …) et faciliterait un partenariat
fondé sur des objectifs communs. Une globalisation des moyens ou, à
tout le moins, une harmonisation et
des complémentarités pourrait devenir ainsi plus efficace et même
réduire les coûts. Le contrôle a posteriori permettrait à l’établissement
de rendre compte des résultats
obtenus.
La
procédure des contrats présente un avantage de simplification en
répondant à la diversité des
situations et en offrant un seul type de démarche quel que soit le
lieu, quel que soit le projet, quels
que soient les contractants ou les partenaires. Elle permettrait aussi
de prendre en compte la durée sans pour autant s'installer dans la
"rente" de situation tout
contrat s'inscrit dans un temps donné. Enfin, le contrat suppose les
bilans intermédiaires et
l'évaluation terminale au vu des objectifs fixés, en particulier
l'examen de l'usage et de
l'efficacité des moyens. En dernier lieu, mais supposant une véritable
changement dans la culture administrative,
cette procédure oblige à la négociation entre
ceux
qui doivent ou veulent contracter.
Le
Conseil propose d'étudier la mise en place de ces procédures selon un
"cadrage" national et
d'envisager une circulaire qui, faisant le point sur les diverses
possibilités interministérielles,
préconiserait un "modèle" de contrat type Contrat
d'Innovation
Educative
(CIE) pouvant se décliner en deux grandes directions :
-
des contrats d'innovation pédagogique (CIP)
-
contrat d'innovation simple : à destination des établissements et
équipes innovante.
-
contrat développement pédagogique pour la mise en œuvre des
novations préconisées par les
Directions, les Recteurs, l'Inspection Générale,
des associations.
-
contrat d'expérimentation en fonction d'une recherche précise à
l'initiative de l'INRP (Institut national
de recherche pédagogique),.les IUFM
( Institut universitaires de formation des maîtres)
-
des contrats d'insertion éducative et sociale (CIES)
-
contrats d'établissements sensibles (ou pionniers) : à destination
d'équipes constituées ou voulant se
constituer, notamment pour des publics
spécifiques ("décrocheurs", en rupture, en zones sensibles…)
-
contrats d'échanges locaux : possibilité pour les établissements et
collectivités d'organiser des échanges
(accueil de classes, de groupes)
à l'année ou sur des durées plus réduites
-
contrats d'insertion éducative : pour les établissements accueillant
ou voulant accueillir des jeunes (en
danger, en rupture, en infraction).
Le
Conseil estime que la mise en œuvre de cette procédure permettrait
simplification, lisibilité et cohérence
et pourrait être complétée par deux "mesures"
complémentaires :
-
la suppression des différents
classements actuels (établissements sensibles, difficiles, sous
contrat etc) qui n'aboutissent qu'à un enchevêtrement et une gestion
cloisonnée
-
le regroupement des moyens
actuellement dispersés selon des bureaux et des plans différents
et qui entraînent des projets annuels et indépendants les uns des
autres.
Dans
le même ordre d'idées, le Conseil s'interroge sur la
composition, le fonctionnement
et les compétences des Comités d'Education à la Santé et
la Citoyenneté.
Ces instances devraient être rééxaminées au vu de leurs objectifs
et de leur fonctionnement. De même les relations entre les Contrats
Educatifs Locaux et les Conseils
d'Administration ou d'Ecole méritent d'être observées.
.
Le
Conseil considère que l'installation et l’extension de l’innovation
passent par la relance de
cette politique fondée sur le triptyque indissociable autonomie -
projet - contrat.
Politique qui permet en outre de répondre aux craintes d’un
éclatement du service public ou de
soumission aux intérêts locaux
Le
Conseil inscrit ces suggestions dans le cadre d'une application de la loi
du 25 janvier 1985 qui
a transféré les attributions des Conseils d'Administration
du domaine réglementaire au domaine
législatif (article 1568 de la
loi du 22
juillet
1983 modifiée) :
"
Le Conseil d'Administration règle, par ses délibérations, les affaires
de l'établissement.
A
ce titre, il exerce notamment les
attributions suivantes :
-
il fixe, dans le respect des
dispositions législatives et réglementaires en vigueur et des
objectifs définis par les autorités
compétentes de l'Etat, les
principes de mise en œuvre de l'autonomie
pédagogique et éducative dont
disposent les établissements et, en particulier,
les
règles d'organisation de l'établissement ;
-
il établit chaque
année, un rapport sur le fonctionnement pédagogique
de l'établissement, les
résultats obtenus et les objectifs à atteindre;
-
il adopte le budget dans les
conditions fixées par la présente loi"
Sans
avoir de compétences juridiques particulières, le Conseil estime que
ces dispositions, proches des
compétences des assemblées délibérantes des collectivités
(communes, départements, régions) énoncent à la fois les règles et
les marges de manœuvre des
établissements mais aussi celles de l'autorité de l'Etat
qu'est le Ministre pour fixer les objectifs pédagogiques et éducatifs.
En ce sens les propositions
concernant le projet, l'autonomie et le contrat, s'inscrivent
dans la politique générale de
décentralisation et de déconcentration.