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la psychosociologie

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PARCOURS DE VIE D'ANDRE DE PERETTI

extrait de Itinéraires de lecture, Perspectives documentaires en sciences de l'Education, n°17, 1989

La psychosociologie

Revenant à mon corps d'origine en 1952, je fus sollicité par mon directeur général des Manufactures de l'Etat pour concevoir un service de relations humaines pour les 15 000 agents du service. Je me tournais alors vers la CEGOS, où je me liais profondément avec Max Pagès, qui avait été étudiant de Carl Rogers. Grâce à lui, commencèrent alors les échanges et l'amitié avec Carl dont je lus toute l'œuvre, et que je contribuais à faire connaître en France. Je me passionnais en même temps pour les oeuvres de Merno et de Kurt Lewin dont une traduction des principaux textes, contestée, sous le titre de Psychologie dynamique était publiée en France en 1959. A l'intérieur de ce livre, un chapitre, essentiel pour moi, sur les modes de pensée galiléen et aristotélicien en psychologie rejoignait mes manières de concevoir les tensions dialectiques entre apollinien- dionysiaque, masculin - féminin, solaire - lunaire. Cette pensée non aristotélicienne, je la retrouvais aussi chez Bachelard, dont l'eau et le rêve venait de sortir chez Corti, et surtout dans la philosophie du non.

J'ai arrêté en 1964 un enseignement de lettres et de philosophie en mathématiques spéciales que j'avais exercé depuis 1951, pour avoir le temps d'écrire et de publier:  Liberté et relations humaines paru en 1966, sur le problème de la Relation dans l'éclairage rogérien, morénien, et même lewinien; puis en 1968, ce fut L'administration, phénomène humain, où je commençais à aborder ce que je développerai plus tard dans ma thèse  Du changement à l'inertie en 1981. Le concept d'énergie sur lequel Teilhard de Chardin puis Norbert Wiener m'avaient alerté, me permettait d'analyser, d'une part les structures sociales et institutionnelles comme accumulateurs et matelas d'énergies motrices et informationnelles, potentielles et actuelles, et d'autre part les structures fines de la personnalité comme stabilisation des échanges énergétiques entre les personnes, rendue possible par la médiation et la protection des structures sociales. Et j'utilisais le concept d'inertie pour désigner les risques permanentes de rigidité et d'absolutisation dans les structures ou les conceptions: bureaucraties ou idéologies.

Contrairement à d'autres psycho-sociologues, je ne suis pas idéologiquement hostile aux institutions. Je cherche à comprendre leur fonctionnement, je cherche à aider leurs acteurs à comprendre leur fonctionnement. à les faire  évoluer dans leur propre voie et dans leur vérité, en les dégageant de leurs super-structures inutiles et des entraînements d'inertie. C'est ce que j'expérimentais de 1952 à 1963 dans des fonctions de responsable des relations humaines et de l'information au SEITA (devenu depuis lors la SEITA), mais aussi comme directeur adjoint d'une usine de 400 personnes à Pantin, de 1955 à 1957, où mon ami Michel Crozier observa mes conduites "anti-bureaucratiques".

Avec Lewin, j'obtenais dans la dynamique de groupe, la confirmation qu'un groupe n'est pas nécessairement un rassemblement d'individus identiques sur une variable quelconque, mais au contraire plus généralement et plus opératoirement peut-être un rassemblement de personnes différentes et cependant inter-dépendantes dans la poursuite de leurs objectifs individuels.

Cette définition, la plus générale et la plus puissante qu'on ait pu donner d'un groupe, est le refus de ce que j'ai appelé le "mythe identitaire": elle apporte une conception contraire au mythe indo-aryen. Car le piège indo-aryen repose sur l'idée que deux êtres A et B sont ou radicalement identiques ou radicalement différents. S'il y a différence, alors apparaît l'idée d'une exclusion totale, d'une séparation, et donc d'un ordre pur, d'une supériorité et d'une infériorité absolutisée etc...

Le refus d'une logique de cloisonnement dans les rapports humains s'est encore alimenté pour moi aux lectures plus récentes de scientifiques et d'épistémologues. Des auteurs tels que Prigogine (La nouvelle alliance), Michel Serres (Les cinq sens), Henri Atlan (Entre le cristal et la fumée, A tort et à raison), Bertrand d'Espagnat (A la recherche du réel, Une incertaine réalité), m'ont invité à penser les phénomènes dans leur diversité, dans l'incertitude aux carrefours des disciplines, sans crainte des moments de rupture ou de "catastrophes" (cf. René Thom). Il fallait intervenir en profondeur pour accroître les rapports sociaux et les interactions entre les personnes.

 

concept :François Muller @ 1998-2009

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