Fonctions de l'évaluation
Zone de Texte: Définir la fonction visée de l’évaluation

Il y a lieu d’abord de revenir à une définition de l’acte lui-même. Car si les pratiques s’imposent aux enseignants, jeunes et moins jeunes, par reproduction d’expériences (subies ?), par routine, par formation sur le tas, il est très rare que l’acte soit remis en questionnement et en sens. On peut s’appuyer sur la définition proposée par Stufflebeam[1] suffisamment large pour englober toute pratique :

processus (1) par lequel on définit (2), obtient (3)  et fournit (4)  des informations (5)  utiles (6)  permettant de juger les décisions possibles (7)

(1) processus = activité continue

(2) on définit = identifier les informations pertinentes

(3) on obtient = collecte, analyse, mesure des données

(4) on fournit = communiquer ces données

(5) des informations = faits à interpréter

(6) informations utiles = qui satisfont aux critères de pertinence

(7) décisions possibles = actions d'enseignement, d'orientation etc....

 

Rien n’est dit sur noter ou des calculs de moyennes.  Il s’agit d’extraire de la valeur d’un acte, d’un travail, au regard de décisions : l’évaluation est ou doit être finalisée.

 

 

J’ai pris l’habitude de tout noter ; mais je sens bien qu’au bout du compte,  j’aie du mal à bien cerner les difficultés de mes élèves.

 

Classiquement, on distingue cinq fonctions :

DIAGNOSTIQUE

analyse des situations, des besoins, des profils et pré-requis d'élèves

PRONOSTIQUE

élaboration d'un projet, test initial

FORMATIVE-FORMATRICE

accompagnement de l'apprentissage, remédiation

SOMMATIVE-CERTIFICATIVE

bilan, jugement, décision par tests terminaux, diplômes

D'ORIENTATION

liaison études / emploi, conseil de classe

 

La  pratique la plus répandue reste celle de l’évaluation sommative qui a contaminé tout rapport entre enseignant  et élèves. Un principal de collège de taille moyenne avait calculé le nombre approximatif de notes chiffrées délivrées au cours d’une année scolaire : sur les seuls bulletins trimestriels, près de 18000 notes, mais rapportés aux nombres de notes dans les disciplines, près de 90 000 notes. On espère qu’elles ont toutes une fonction bien assurée et bien comprise.

 

Quel évaluateur êtes-vous ?

Une étude de la DEP (ministère de l’Éducation nationale) analyse les pratiques d’évaluation des enseignants au collège en  trois portraits types.

Un premier groupe,  la moitié,, principalement des professeurs des disciplines scientifiques « peu soucieux de différenciation ou de remédiation, ces enseignants décident seuls des modalités de l’évaluation, à partir des manuels. Leurs pratiques évaluatives, centrées sur les contenus disciplinaires, s’appuient sur des écrits de restitution, dans une démarche d’évaluation plutôt sommative, située en fin de séquences d’apprentissage ».

Un second groupe (38 % des enseignants), principalement des professeurs de français, de langues et d’histoire-géographie. Ils ont une approche plus collective et plus diversifiée : « Appel à l’autonomie et à la créativité des élèves dans des tâches qui sollicitent des compétences transversales prises en compte dans les barèmes de notation, élaboration des évaluations au fur et à mesure des séquences en fonction du niveau d’acquisition réel des élèves; importance donnée à la correction, au repérage des erreurs, à l’implication des élèves dans cette phase; utilisation des résultats des évaluations pour individualiser les apprentissages, proposition de remédiations, réorganisation des contenus enseignés. »

Le troisième groupe, le plus innovant : composé de professeurs d’EPS et d’arts plastiques, il placerait l’évaluation en début de séquence, l’élaborerait collectivement et pratiquerait l’évaluation-diagnostic et l’évaluation formative.

Mais, selon l’étude, les pratiques seraient en pleine évolution et un tiers à la moitié des enseignants repenseraient leur façon d’évaluer en observant les résultats des élèves.

La « fabrication industrielle » de la notation cependant pose aujourd’hui problème, tant par sa masse que par sa fiabilité, par une perte de sens et aussi notamment en matière d’orientation scolaire et professionnelle :

-          qui pourrait dire à quelles compétences renvoie une note de 8,74/20? (Voir «Définir des objectifs », page 405.). Qu’est-ce que cette « dictature invraisemblable de la moyenne », selon le rapport courageux de Roger-François Gauthier, IGAEN, qui réduit considérablement la précision de l’analyse des acquis et des manques ?

-          Pour stabiliser une note en français, il faudrait 147 évaluateurs, et 54 en mathématiques !

-          Comment expliquer que toute classe se répartisse, quel que soit le niveau, le groupe,  tout homogène en début d’année, le degré d’enseignement, sous le joug de l’évaluation répétée, en trois catégories distinctes et hiérarchisées ? Serait-ce une nouvelle « loi naturelle » dont l’Ecole serait le berceau ? André Antibi dénonce cette « constance macabre  », véritable pratique solitaire et récurrente de l’enseignant.  (Voir l’analyse et les propositions de résolutions d’André Antibi sur http://mclcm.free.fr/, en complément des pages de Jacques Nimier consacrée à l’évaluation http://pagesperso-orange.fr/jacques.nimier/dossier_evaluation.htm =

Il s’agit de faire en sorte que l’évaluation soit objet de réflexion partagée, collective, plus harmonisée, plus stabilisée : qu’elle devienne une activité elle-même évaluée ! L’approche par tableaux de compétences proposée par le « socle commun » en primaire et au collège constitue de ce point de vue un progrès notable.

On me dit d’évaluer mes élèves ; j’improvise au mieux, car  je n’ai jamais appris à le faire.

 

 

q       Avant de penser à noter, repérez au préalable la fonction que vous assignez à l’évaluation que vous allez mettre en œuvre. Assurément, la fonction sommative ne doit être réservée qu’à des évaluations terminales de modules, de séquences. Ce n’est pas parce que les carnets de notes édités par des fabricants de papier comporte douze colonnes que toutes doivent être remplies à l’issue du trimestre.

[1] STUFFLEBEAM, D.I. (1980) L'évaluation en éducation et la prise de décision Ottawa, Edition NHP, 464p.

Remonter ] [ Fonctions de l'évaluation ] Articuler formatif et sommatif ] Pièges de l'évaluation ] Rédiger une appréciation ] L'avis des élèves ] Rapporter des compétences ] Rapporter des travaux ]

scénario de départ