Faciliter  l’autonomie et le développement de la responsabilité

¢     Instantanés et détours métaphoriques

 

« Sur cette photo, les plus jeunes travaillent de façon autonome, les CE1 individuellement en lecture, les CE2 en groupe sur une activité de recherche en mathématiques. Les CM travaillent avec l´enseignante en lecture (travail commun en lecture et production d´écrit tout au long de l´année). L´élève de grande section est à l´heure du goûter.

Cette photo est à l´image de l´autonomie acquise par les élèves tout au long de l´année et de leur capacité à travailler ensemble, en ne demandant l´intervention de l´adulte occupé avec un autre groupe seulement si cela est nécessaire. »

 

 

« Sur cette photo, les élèves s´apprêtent à sortir en récréation. Avant cela, ils viennent regarder une pièce de monnaie anglaise rapportée par l´élève de grande section qui assiste à un des cours d´anglais de la semaine (sans y participer). Nous avions parlé la semaine précédente de Londres. »

 

¢     Quels sont les types de problèmes évoqués en matière d’autonomie ?

« Comment gérer le manque d’autonomie de certains groupes d’élèves ? »    

« Manque d’autonomie des CP qui sollicitent mon aide très souvent (cela vient du fait qu’ils ont l’habitude d’être seuls avec moi, 4 séances sur 5). »

« Les classes à plusieurs niveaux dont l’autonomie est faible ( ex CP- CE1- CE2). Les élèves faibles en lecture notamment réclament une présence plus grande de l’enseignant. Les situations d’autonomie sont plus courtes et l’auto validation plus difficile à proposer. »

« L’élève ne parvient pas à travailler sans l’aide individualisée du professeur (défaut d’autonomie) ».     

 

« Que faire lorsqu’un enfant n’a aucune autonomie, a presque besoin de regarder les autres (camarades ou enseignante) effectuer le travail pour lui, devant ses yeux ? Diminuer le niveau du travail pour redonner confiance ? Inutile. Créer des jeux ? Lassant. Rester avec lui ? Tout juste divertissant… »

 

« La mise en place d’un emploi du temps respectant les rythmes des enfants. »

« A certains moments, on est obligé de mettre un des deux niveaux en travail autonome ( pour s’occuper de l’autre niveau) alors que ce n’est forcément bienvenu dans la progression de leur travail. »        

 

¢     Besoins de quoi ?

« Les outils de l’autonomie en classe. »

« J’aimerais créer des outils autocorrectifs, motivants pour le travail autonome. »

« Donner aux élèves de meilleures bases afin que les moments de travail en autonomie soient plus efficaces. »  

 

¢     Des « moments » facilitant l’autonomie

 

Les écrits mentionnent plusieurs occasions ou pratiques favorisant le développement de l’autonomie des élèves, comme par exemple :

 

D’abord un travail en commun sur l’autonomie

« Moments de réflexion commune (« Vivre Ensemble ») réguliers sur des sujets concernant la cohésion du groupe-classe et la vie de la communauté scolaire (maternelle – primaire – collège) »

« Séances de sport et d’éveil où l’esprit de classe se ressent ».   

« Lorsque la classe fonctionne sans on intervention, chacun sait ce qu’il a  faire et le fait efficacement. »

 

Ensuite, une organisation du travail

« Il est rare que les enfants des classes à plusieurs niveaux se laissent aller à ne rien faire. Ils sont souvent maîtres de leurs activités et ne vont pas forcément vers la facilité. Ils aiment s’organiser et savent choisir le type d’activités qui leur apportera quelque chose : de nouvelles compétences, des connaissances enrichies, des paris sur leurs propres capacités… ce sont des moments dynamiques où les échanges sont nombreux avec ou sans l’enseignant, entre les groupes ou à l’intérieur d’un groupe. »

 

« L’aide des élèves : les plus grands font lire les CP.

L’entraide : le groupe de CP est en exercice pendant que je m’occupe des GS. Il leur est demandé de ne pas déranger les GS. Les enfants s’organisent entre eux pour résoudre les problèmes qu’ils rencontrent dans le calme, le sérieux et la bonne entente. »

 

Accepter les formes de l’autonomie

« Lorsque les enfants d’un même groupe ont compris les règles de conduite et les consignes de travail pour effectuer leur travail en autonomie et me laisser le temps de travailler avec l’autre niveau.

Certains élèves intéressés par leur projet restent en classe plus longtemps que l’horaire prévu  afin d’améliorer / mettre en forme / terminer une production. »

 

 

 

¢      (Re)découvrir le concept de curriculum « caché »

Perrenoud (1994) a bien mis en valeur les différentes contraintes mises en place dans toute institution scolaire, qui font que son public est assujetti à un métier ayant des règles et des normes très précises : horaire stable, souvent rythmé par une sonnerie, absences et retards relevés et sanctionnés, travail à faire en classe et à la maison,  performances (connaissances aussi bien que comportement) notées individuellement,  et communiquées aux parents, écarts de conduite relevés et sanctionnés,  conseil de classe décidant de l'orientation de l'élève,  organisation de classe et d'établissement codifiée par l'enseignant et le règlement.
Pour Sembel (2003), le travail scolaire ne doit pas seulement recouvrir ce qui permet à l'élève de réussir dans son apprentissage, car est évacué ainsi le travail jugé "inefficace", qui existe pourtant.

Les différentes variantes du curriculum (i.e., programme) (formel, réel, caché) permettent justement de mieux comprendre l'inscription sociale du métier d'élève. Le curriculum formel est celui des programmes officiels appliqués par les enseignants ; le curriculum réel est le travail réellement réalisé par les élèves, une fois qu'il a été organisé par l'enseignant qui tient compte de diverses contraintes ; le curriculum caché étant enfin ce que les élèves doivent faire pour réussir, sans que cela soit explicitement annoncé par l'institution ou les enseignants.

Pour analyser le travail de l'élève, on peut comparer deux à deux ces curricula (formel vs. réel, formel vs. caché, et réel vs. caché) pour mieux comprendre ce que l'élève doit vraiment faire pour être efficace. Comme le soulignent Barrère et Sembel (2003), le métier de l'élève est nécessairement plus complexe que de seulement suivre les curricula ;

 

Cela montre aussi que son activité est beaucoup plus autonome par rapport à l'institution scolaire qu'on le pense.[1]

 

Distinguer trois niveaux dans une relation éducative, même hors de toute organisation scolaire[2] :

·         celui de la " programmation " d'un parcours éducatif, notamment dans l'esprit de l'éducateur ; c'est le niveau du curriculum rêvé, prescrit ou formel ;

·         celui des expériences que vit l'apprenant et qui le transforment ; c'est le niveau du curriculum réel ou réalisé ;

·         celui des apprentissages qui en résultent.

 

Par exemple, lorsqu'on demande à un groupe d'étudiants en sciences de l'éducation, au début d'une recherche sur le curriculum caché, de répondre à la question "Qu'ai-je appris à l'école sans qu'on me l'ait ouvertement enseigné ?", on obtient une liste impressionnante : 1. A vivre avec d'autres dans une foule, à l'intérieur d'un petit espace. 2. A passer le temps. 3. A supporter le jugement des autres. 4. A craindre pour ce qu'on possède, à se méfier des autres. 5. A échapper à la violence, à se défendre. 6. A ne pas perdre la face. 7. A jouer sur plusieurs registres en présence d'autrui. 8. A construire une façade, à dissimuler. 9. A flairer les différences chez les autres, à s'adapter. 10. A juger (ses camarades, la maîtresse). 11. A s'inscrire dans un milieu contraignant. 12. A faire sa place, à se défendre. 13. A doser son effort. 14. A apprendre, à bachoter. 15. A tricher, faire semblant, simuler. 16. A travailler, à évaluer positivement le travail. 17. A se maîtriser, à se contrôler, à ne pas crier. 18. A être solidaire, à s'entraider. 19. A respecter les autres et les différences. 20. A flatter (lèche-botte). 21. A se révolter. 22. A passer des limites. 23. A être patient, à supporter, à endurer. 24. A être docile, à faire sans avoir envie. 25. A se noyer dans la masse, à se faire oublier, à être comme tout le monde. 26. A se connaître soi-même, à se situer. 27. A rêver dans une foule sans se faire prendre. 28. A faire des choix, à s'organiser. 29. A se créer un milieu de vie. 30. A vivre dans une jungle, à marcher sur les autres. 31. A se débrouiller. 32. A penser qu'il faut être bon, qu'il faut être le meilleur. 33. A être confronté à des choses dures à vivre, à des engrenages (du type du petit crédit), à des contradictions. 34. A se protéger, à se blinder. 35. A crier en silence. 36. A attendre la récréation. 37. A obéir, à se plier à une discipline. 38. A avoir une bonne ou une mauvaise estime de soi. 39. A travailler à heure fixe. 40. A gérer son temps. 41. A apprendre la hiérarchie. 42. A être autonome. 43. A identifier des jeux et des enjeux.

 

Avez-vous sondé (« évaluer »), d’une quelconque manière, vos élèves, pour dégager ces formes de savoirs « cachés », qu’il s’agit alors de réinvestir dans le currriculum réel ?
 

¢     Passer d'une représentation de la classe à trois niveaux à celle d'une classe de cycle,

 

Cela permet d'envisager la classe dans sa continuité mais en tenant compte des parcours et compétences individuels au delà de la position de l'enfant dans le cycle. Autrement dit, l'élève de CE1 qui doit se renforcer en lecture peut travailler avec les CP et celui de GS qui commence à apprendre à lire peut très bien s'engager dans cet apprentissage.

 

L'évaluation et des points réguliers permettent alors de savoir où en est chacun et le cas échéant qui a besoin d'une année de plus ou qui a besoin d'une année de moins…

Il faut s'appuyer sur des outils comme ceux déjà mis en ligne pour le CP et la GS

http://eduscol.education.fr/index.php?./D0135/accueil.htm
Ces évaluations seront bientôt complétées par des outils pour le CE1 et le sont déjà par l'évaluation nationale au début de cycle 3 qui permet d'isoler les compétences " de base " (nécessaires pour suivre le cycle 3 sans difficulté).

 

¢     S’appuyer sur des relais pour fonder l’autonomie des élèves

 

Faire passer " parents " et " élèves " d'une position de consommateurs à une position "d'acteurs ". Il s'agit d'impliquer les parents et les élèves… mais rendre acteur suppose paradoxalement que le maître se départisse de certains pouvoirs qu'il croyait détenir pour restituer son autorité dans " la vraie valeur ajoutée " apportée par la connaissance qui prendra le maximum de sens si elle confère un peu plus de pouvoir aux élèves.

C’est passer d’une illusion de maîtrise totale des savoirs, « tout faire sur tout », pour le maître, à la supervision, l’organisation de parcours riches et diversifiés pour les élèves, en s’appuyant notamment sur des cursus conjoints tels qu’ils existent dans certains pays, en accord, avec l’école locale (pour les langues en particulier).

Dans une classe multi - âges, le " pouvoir gagné " par l'acquisition d'une compétence c'est par exemple, d'avoir le droit de " lire un album à un petit ", d'écrire une lettre à un auteur ou un responsable de la commune, d'effectuer des tâches ou des missions dans l'école , de transmettre des connaissances aux autres … le droit d'organiser, de proposer (vous avez compris le cycle de vie de la plante, vous allez pouvoir commander les graines à semer de votre choix avec le catalogue et en utilisant la coopérative ; vous avez étudié " l'escargot " vous allez pouvoir présenter votre exposé à une autre classe…

 

Les parents peuvent être impliqués sans complexe : telle maman connaît des contes régionaux anciens, tel papa sait monter un mur " droit " et va pouvoir nous aider à mieux comprendre la verticale, tel autre joue d'un instrument… La confrontation des parents au groupe va leur montrer aussi qu'un enfant ce n'est pas la même chose que trente et la réalité que vit le maître sera mieux mesurée…  

 

¢     Ressources possibles

Classe à multiniveaux : "Mes élèves ne sont pas assez autonomes",  p.10-11 .- JDI, 2002/03-02.- 10/2002.

A partir du témoignage d'un enseignant en classe à multiniveaux (CE2, CM1 et CM2) en milieu rural, analyse des difficultés rencontrées, propositions et suggestions pour aider à l'autonomie des élèves : préparer la prise d'autonomie, définir les termes du contrat, travailler avec un Conseil d'enfants, fixer des objectifs et laisser une liberté très encadrée.


Remonter • Qu''est-ce qu'une classe multi-niveaux ? • Faciliter l'autonomie et le développement de la responsabilité • Organiser la coopération dans une classe multi-niveaux • Développer son ingenierie pédagoigque • Conjuguer transversalité et situations disciplinaires