- Historique de la didactique en Histoire, par AM Gérin Grataloup
- Les tendances de la didactique de l'Histoire,
par C. Laville, Université Laval, Québec
compte-rendu de la journée d'étude des
didactiques de la géographie et de l'histoire du 8/ 12 /99 à l'INRP
par Pascal François
Historique de la didactique en Histoire
première intervention de AM Gérin Grataloup
Tente un état des lieux de la recherche en didactique sous l'angle des pistes de recherche et non des résultats.
Propose un schéma d'interprétation, en fait un classement des recherches effectuées par l'INRP:
- Les recherches les plus nombreuses concernent le primaire
- Le volet enseignement est le plus exploré ; création d'outils nouveaux ,
de
concepts plus heuristiques, dans le cadre de la recherche action
- Le parent pauvre reste : Comment les élèves apprennent ils ?
Nécessite l'ouverture vers des champs plus variés (sémiologie …)
- Pb de légitimation de la recherche en didactique, de la reconnaissance
institutionnelle
N. Tutiaux Guillon
- La recherche en didactique s'ordonne autour de trois pôles
- Finalités
- Savoirs
- Formes didactiques
L'entrée par les finalités est rare, l'entrée par les disciplines est
privilégiée
2 soucis : produits des outils pour de meilleures pratiques références : réflexion sur les pratiques
Pluralité des lieux et des acteurs ; révélatrice d'un moment avant constitution d'un système de concepts lui donnant matière
Nécessité d'un projet scientifique et de finalité de la didactique
Rareté des recherches qui visent à la modélisation
Champs de la didactique pas assez autonomisé pour produire ses propres outils
Recherche de critères et de paradigmes dominants, explicites, permet la validation
Le modèle de la transposition didactique (Chevalard)
Dégager dans les savoirs savants des accommodements tout en limitant la distorsion
Le modèle de la discipline scolaire (Chervel)
Quatre composantes :
Contenu ( vulgate )
Batterie d'exercices
Pratiques de motivation
Epreuves de nature doximologiques
Objet : atteindre les finalités
Pratiques sont constitutives du savoir scolaire
Disciplines scolaires sont autonomes par rapport à la discipline scientifique
Hésitations entre les modèles
Pas de groupe capable de transmettre les savoirs, contrôler les moyens de recherche, décerner les diplômes
Les deux paradigmes ne permettent pas de construire des apprentissages, il faut donc de nx concepts
Eléments du débat
G. Hugonie : Flou des méthodes de recherche, de validation ; pb des membres de jury de thèse
Il est prématuré de figer la recherche ; si on avait fixé le modèle il y
a 5 ans c'est celui de la transposition didactique qui aurait triomphé.
Eviter d'empêcher l'émergence de nouveaux paradigmes
N. Lautier
Les deux modèles (celui de Chevalard (triangle didactique) et celui de Chervel (paradigme de la discipline scolaire ) sont complémentaires car
description de Chevalard est un état du processus qui se met en place avant le cours.
Intervenant genevois
Chevalard propose une interprétation des transformations subies ;
déformation
de la pensée de Chevalard est liée à la tradition disciplinaire en Histoire.
Pour Lavisse transposition = traduction ; opération effectuée par
l'enseignant dans la classe
Recherches nécessaires sur la didactique à l'Université, mais quelle
université capable d'accepter
Intervenant grec
Choqué par la très faible ouverture de la didactique française vers d'autres
pays
Est mis en avant le pb de langue
- Mise en perspective historique : préoccupations et didactique des géographes
JP Chevalier / M. Romégous
Tableau brossé des productions en didactique du milieu du XIX à l'époque
actuelle.
- Pionnier :Dictionnaire de pédagogie de F. Buisson
Séparation entre primaire et secondaire
Deux géographies
Foncin : géo énumérative
Schrader : géo descriptive et émotionnelle
1911, Schrader reste seul
Enseignement dans les lycées
Vidal : psycho pédagogue
Gallois : enseignement pour les futurs cadres de la nation
Gallouedec : dans les petites classes que de la mémoire
Dupuis (directeur d'Ecole Normale) conteste
- 1910 / 1950
harmonie entre monographies savantes et pédagogie de l'activité
Demangeon : enquêtes faites par la classe avec légitimité scientifique
Partie pédagogique très développée dans l'Info Géo
Rupture autour des années 50 ; hégémonie de l'enseignement secondaire sur la
discipline scolaire
René Haby : géographe qui fusionne les cursus scolaires
Max Sorre : pédagogie de l'activité
- Institutionnalisation de la didactique autour de l'éveil vers 1968-1985
Recherches plus pointues et refontes de la discipline scolaire mais pas de
refonte des contenus (replatrage)
Constructivisme piagetien
Mais vraie rupture avec les philosophes ; phénoménologie
Modèle de travail est celui de l'écologie
Second modèle constructiviste : celui de Bruner
La culture sert de médiation
Mise en place des finalités civiques ; poids très fort des sciences sociales
- 1985/ 1995
IUFM : institutionnalisation des lieux sans production
Plus de critères de légitimation
LA RECHERCHE EN ÉDUCATION HISTORIQUE:
MISE EN PERSPECTIVE ET ORIENTATIONS ACTUELLES
Intervention de C. Laville, Université Laval, Québec
Dans cette communication, il s'agit de souligner les tendances principales qui paraissent marquer la recherche en enseignement et apprentissage de
l'histoire, de tenter d'en dégager l'apport et le sens et de voir comment elles révèlent une vision sociale.
Devant la somme, considérable, des recherches, il a fallu fixer quelques limites:
- a) Il sera essentiellement question de recherche empirique. Ce qui ne
signifie pas que nous sous-estimons d'autres types de recherche, et surtout pas la recherche spéculative, dont on sait l'importance dans notre
domaine. 1
- b) Comme l'intention principale est de dégager les tendances de recherche,
nous ne nous arrêterons pas aux méthodes, sauf dans les cas où elles seraient
révélatrices des tendances. 2
- c) Pour mettre les tendances actuelles en perspective, nous remonterons
quelques années en arrière. Mais nous ne tenterons pas de rapporter les centaines de recherches faites depuis lors: nous n'en signalerons que
quelques-unes, choisies pour leur valeur d'exemple.
- d) Sauf exception, cette sélection a été faite parmi les textes publiés
en anglais ou en français Iles langues que nous connaissons). Cela n'exclut
pas entièrement les recherches provenant d'autres pays que francophones ou anglophones, mais réduit leurs chances d'être prises en considération.
Il reste que la production en langue anglaise occupe une place de choix
dans la réalité - pensons à l'abondante production américaine - et il ne
faudrait pas oublier par ailleurs que la recherche en éducation, qui a pris son envol
dans les années 1960, l'a fait inégalement selon les pays; il n'est que de
consulter les sections " recherche " de la bibliographie internationale de didactique de l'histoire
(Pellens et ai. 1994) pour le constater 3
Ces considération énoncées, il nous semble que la recherche en éducation historique, durant les décennies récentes, s'est déployée selon deux
axes principaux. D'une part, des recherches préoccupées de la façon dont les élèves apprennent ou pourraient apprendre l'histoire; nous en parlerons
sous le titre: l'apprentissage historique des élèves. D'autre part, des recherches
sur le sens de l'apprentissage historique; nous les présenterons sous le titre : la fonction
sociale de l'histoire-
I. L'apprentissage historique des élèves
La recherche relative à l'apprentissage historique a traversé la période et paraît avoir profondément marqué le champ de la recherche en
enseignement et apprentissage de l'histoire. De son origine à aujourd'hui, elle a aussi
connu une évolution porteuse de signification sociale que nous allons essayer de
dégager.
A) LA RECHERCHE AXÉE SUR L'Apprentissage DU PROCESSUS
C'est en Grande-Bretagne, principalement, que la recherche sur l'apprentissage historique éclôt à la fin des années 1960, puis fleurit
durant les années 1970. Elle répond à trois préoccupations interreliées:
a) l'éducation historique doit former les capacités intellectuelles d'individus
autonomes et critiques;
b) pour cela, faire acquérir le mode de construction des savoirs - le processus. - doit primer sur l'acquisition des savoirs
construits - le produit;
c) la théorie de Piaget des stades du développement tic la pensée logique
(pré-opératoire, opératoire concret, opératoire formel) serait un modèle adéquat pour décrire et mesurer l'accès au processus,
c'est-à-dire à la pensée historique.
Pensons, par exemple, à l'influence d'un ouvrage comme The process of
Education de Jerome Bruner (1960).
~ Signalons toutefois que la recherche empirique nous a paru en croissance constante par rapport à la spéculative, et que dans la première les
approches qualitative; prennent (le plus de place à côté des démarches quantitatives.
~ Autre illustration de ce fait, un chercheur espagnol faisait constater lors d'un congrès récent sur la recherche empirique en enseignement de
l'histoire son pays que 80 % des recherches de ce type ont été effectuées dans les
15 dernières années. Voir Valls (1998), p, 1.
L'élan pour ces recherches est donné par le psychologue E. A. Peel, qui se fait en Grande-Bretagne l'interprète principal de la théorie de Piaget
dans le champ de l'éducation; son projet est d'appliquer aux sciences humaines, à
commencer par l'histoire, les conclusions que le psychologue genevois à tirées de ses
observations en sciences de la nature et en mathématiques (Peel 1967). C'est un
élève de Peel, Roy Hallam, qui conduit les premiers travaux importants en ce sens. À partir de 1966, Hallam essaie de mesurer le
degré de développement intellectuel d'élèves en histoire en les soumettant à des
tâches de raisonnement historique (Hallam 1967, 1970, 1972). Chaque fois, les résultats obtenus font
douter de leurs capacités d'effectuer les raisonnements déductifs - un des attributs principaux de la pensée
formelle d'après Piaget - que suppose la pensée historique. Alors que Piaget avait
estimé que le stade de la pensée formelle s'atteindrait vers 12 ans, Hallam conclut qu'en histoire il ne
s'atteindrait que vers 16 ans sinon 18.
Comment alors faire acquérir la pensée historique? Quand Hallam tente d'intervenir "pédagogiquement pour accélérer l'accès au stade formel sur des matières
historiques, il n'y réussit que très modestement (Hallam 1979a, 1979b).
Les recherches de Hallam inspirent nombre d'autres recherches animées de la même préoccupation, en Grande-Bretagne 4 et ailleurs. Ainsi Margaret Jurd qui, en Australie, présente à des élèves trois sociétés avec chacune une
série de caractéristiques choisies, sur lesquelles ils doivent pratiquer des raisonnements historiques (1973, 1978). Là encore les résultats sont
médiocres pour ce qui est du degré de développement nécessaire pour effectuer les
raisonnements. Ces recherches connaissent un écho important. En ressort l'idée
que l'histoire est une matière trop difficile pour les élèves. " Some people have even been led to the extreme [...] conclusion, écrit
Dennis Gunning, that since history is full of abstract concepts, it is not suitable as a subject at all for students under
sixteen " (p. l1). Les enseignants sont désemparés: " Where Hallam's work has made any
impression, constate à son tour Martin Booth, it has been a depressing one " (1978,p.4).
Certains, comme l'historien réputé G. R. Elton, proposeront de garder l'étude
de l'histoire pour l'université car, explique-t-il, " "serious" history requires some maturity " (1970, p. 21); en attendant,
"the great majority should be excited by stories and descriptions distinguished from other
similar tales by being about real people " (ibid.). Son opinion ne sera pas sans influence. On aurait pu revoir les méthodes de recherche, dans
lesquelles plusieurs défauts avaient été constatés. Ainsi, pour mesurer les capacités des élèves à produire du savoir, Hallam ne leur proposait pas
des données brutes mais des récits construits sur le modèle des récits de manuels, et compliqués à loisir " to present as much information as possible " (1979a, p. 6).
Jurd, de son côté, présentait aux élèves trois sociétés totalement imaginaires, sans rapport aucun avec quelque réalité que ce soit. L'un
et l'autre tentaient de reconstruire les catégories de Piaget a posteriori, à partir des réponses des élèves, plutôt que d'en avoir établi a priori
une traduction adaptée à l'histoire; on se retrouvait alors chez Hallam avec des
variables, des équilibres de forces, des systèmes de compensation et d'équilibration... bien étrangers à la nature de l'histoires 6. Mais,
plutôt que de reconsidérer les méthodologies, on préféra déclarer le modèle
piagétien inadéquat. Ainsi Martin Booth qui affirma: "Piaget's framework of cognition is far too limited and restricting an instrument for analysing
the complex strand which go to make pupils thinking and understanding of history.
" (1987, p. 27)
Quelques chercheurs, cependant, continuèrent à mener des recherches d'inspiration
piagétienne. Ainsi l'Australien Kerry Kennedy, qui conjugue un modèle de traitement de l'information aux principes des stades pour estimer
le développement de la pensée historique (1983). De même Denis Shemilt, dans son évaluation du School Council History Project 13-16 (1980). Celui-ci est
justement un programme scolaire d'apprentissage de l'histoire conçu dans l'esprit d'une histoire centrée sur le processus plutôt que sur le
produit; il s'agit de " faire faire de l'histoire " aux élèves, comme on disait
alors. Programme d'adoption volontaire, il est largement répandu en Angleterre dans
les années 1970. Dans son évaluation des résultats, qui tient compte de la théorie de Piaget pour ce qui est des caractéristiques de la pensée
formelle mais après l'avoir adaptée à l'histoire (p. 44, Shemilt ) montre de façon probante qu'il est possible de faire acquérir aux élèves
d'importantes capacités de pensée historique. Le portrait des capacités historiques qui en ressort reste
probablement le plus juste à avoir été tracé en résultat d'une démarche empirique.
4 Plus de 20 thèses dans cette perspective en Angleterre seulement. Voir Booth (1980), p. 245.
5 Plusieurs articles firent connaître ces recherches hors de Grande-Bretagne. Ainsi Sleeper (1975) et Zacarria (l 978) aux
Etats-Unis, Osborne (1975) au Canada, Laville (1975) en Europe francophone.
6 Voir noire critique dans Lavi IIe et Rosenzweig (1982).
Cette démonstration rassura quelque peu les enseignants et les chercheurs sur les capacités des élèves d'apprendre l'histoire. Mais pas assez pour
poursuivre dans la voie jusque alors empruntée. Les recherches qui suivent commencent par
redéfinir l'histoire et les objectifs de d'éducation historique 7. Pour Martin Booth, par exemple, le processus logique qui
d'hypothèse en vérification d'hypothèse préside à la construction du savoir
historique est mis de côté pour faire place à l'imagination créatrice, à la
reconstitution par les élèves de pans du passé selon un mode d'association de
laits et d'idées nommé " adductif " (Booth 1983, 1993). D'autres, comme Alaric Dickinson et Peter Lee, vont centrer l'explication historique sur
les motivations des acteurs, revenant à une vision de l'histoire ignorante des faits de structure et de la variété des forces qui
s'exercent dans une situation sociale. Apprendre aux élèves à se mettre à la
place des acteurs pour comprendre leurs motivations -l'empathie - devient central dans
leur perspective de recherche. Les mots empathie, imagination et compréhension remplacent d'ailleurs progressivement les mots pensée et raisonnement.
Les titres même de leurs articles ou ouvrages en témoignent (Ashby et Lee 1987; Dickinson et Lee 1978; Lee, Dickinson et Ashby 1997). D'ailleurs, dans
un texte récent à propos d'une recherche en cours, on voit que différents stades
d'empathie servent à définir la " compréhension rationnelle " (Lee, Dickinson
et Ashby 1997, p. 142).
B ) LA RECHERCHE AXÉE SUR LE PRODUIT
Dans la seconde moitié des années 1980, une nouvelle tendance se dessine, en se justifiant des travaux antérieurs (voir Levstik 1985; Downey et
Levstik 1988, 1991; Wineburg 1996). Prenant pour acquis l'échec de la recherche
sur l'acquisition de la pensée historique, on va se recentrer sur la compréhension
historique. Ce qu'il faut entendre alors, c'est l'acquisition de savoirs construits,
du type de ceux que présentent les manuels, plutôt que l'acquisition de la démarche de construction des savoirs en histoire. Le
produit plutôt que le processus donc.
C'est au Etats-Unis, principalement, que la tendance se dessine. Il est probable qu'elle est inspirée par une inquiétude qui s'est elle même
répandue dans le pays, celle que les élèves sortent de leurs cours d'histoire
" sans rien savoir ". De nombreux témoignages manifestent cette inquiétude.
Ainsi l'enquête menée dans les années 1980 par Diane Ravitch et Chester Finnl 987) et qui eut beaucoup d'écho, dans les médias notamment8. La même
inquiétude existant ailleurs, on verra ce type de recherche répliqué dans d'autres pays.
La théorie de Piaget, qui a inspiré directement ou indirectement les recherches antérieures, est mise à l'écart. On lui préfère les théories
venues du champ de la linguistique, de la pédagogie de la lecture, et de leur support en psychologie cognitive. Nombre des chercheurs, d'ailleurs,
proviennent de ces champs plutôt que de l'histoire ou de l'éducation historique. Le récit - c'est-à-dire le produit -est au centre de leurs
préoccupations. Comment le faire absorber avec compréhension, c'est-à-dire en
saisissant le sens que son auteur a voulu y mettre ? Le mieux, pensent certains, est de raconter une action où un enchaînement causal conduit à
une issue explicite. On propose alors de réécrire les manuels en fonction de tels
enchaînements. Comme nombre de ces recherches sont laites avec des élèves du primaire, il apparaît chez plusieurs chercheurs que la structure
narrative du conte pour enfant, avec son appel à l'imagination, sa mise en valeur de
personnages identitaires et ses enjeux moraux, serait un modèle convenable-
Voyons quelques exemples de telles recherches.
En 1989, lsabel Beck et ses collaborateurs montrent, dans une recherche conduite avec des élèves du primaire, que leurs défauts de compréhension
tiennent à un manque de connaissances préalables, notamment pour ce qui est du contexte des faits narrés (Beck, McKeown et Gromoll 1989). En 1991,
elles et d'autres soumettent à de semblables élèves, d'un côté des textes originaux
de manuel, et de l'autre, des versions réécrites par leur soin des mêmes textes, en ayant porté une attention particulière aux éléments de mise
en contexte et aux enchaînements cause-événement-conséquence. Il est montré que
les élèves retiennent plus d'informations et d'idées dans les textes réécrits
de cette façon (Beck, McKeown, Sinatra et Loxterrnan 1991; McKecown et Beck 1994).
Quelques chercheurs, quand même, poursuivront dans la voie antérieure, préservant l'objectif
d'une formation centrée sur l'apprentissage de la pensée historique, mais sans plus procéder généralement en référence à
la théorie piagétienne. C'est principalement le cas en milieu anglo-saxon, particulièrement en Grande-Bretagne. Ainsi Rob Williams et Ian Davies
(1998) ont publié récemment les résultats d'une petite recherche sur les capacités
interprétatives d'élèves, et donc d'un aspect important de la pensée historique, et en ont déduit une hiérarchie de stades, embryonnaire mais prometteuse.
Ailleurs, Rohcrt Martineau (1997) a montré, au terme d'une vaste enquête auprès d'élèves et d'enseignants, que la pensée historique et
enseignable. Sa preuve: quand les enseignants la comprennent et l'enseignent, les élèves l'acquièrent.
Linda Levstik est également une chercheure venue du champ de la lecture.
Dans un exposé de ses perspectives de recherche, elle écrit que " drawing on ideas
from interpretive anthropology and serniotics, the authors then place finis primarily psychological work in a cultural framework, and give
consideration to trie relevance of theories of narrative for studying historical
understanding " (Levstik et Papas 1992, p. 369). Pour elle et ses collaborateurs, l'histoire est principalement un produit. D'ailleurs,
lorsque dans un livre récent elle explique en quoi consiste la nature de l'histoire,
c'est toujours sous cet angle que la ~ discipline est vue. (Levstik et Barton 1997, p. 1-8). Son modèle idéal du récit historique destiné aux élèves
est celui du conte pour enfant ou du roman historique. C'est d'ailleurs de tels recit qu'elle propose à des élèves du primaire
dans ses recherches ' (Levstik et Papas 1987, Levstik et Barton 1997). Elle en conclut que les récits
de manuel devraient être réécrits de façon à être " rich in the kind of details
that support the writer's interpretation but also engage the reader in the historical account " (ibid., p. m166), et que le fil directeur de ces
récits devrait être un enchaînement causal. Ainsi, " children's causal theories
drawn from historical narrative, for instance, rnight provide children with a framework from other sources " (Downey et Levstik 1988, p. 340).
Ailleurs, toutefois, Levstik se montre consciente du risque de simplement faire consommer de tels récits historiques et propose qu'en outre les élèves
soient progressivement initiés à les recevoir de façon critique. Il s'agirait
pour cela d'attirer leur attention sur les perspectives différentes que les protagonistes des récits ont vis-à-vis les événements. De cette façon l'étude
de l'histoire, à partir de récits de fiction historique, " could encourage a student's interpretation and analyse of textbook versions of history " (Downéy et Levstik 1991, p. 404). Mais ça reste toujours une
histoire centrée sur le produit. ' '
On retrouve la même préoccupation chez Peter Lee en Angleterre dans une recherche en cours (Project CHATA). La recherche porte aussi sur la
compréhension du récit historique par les élèves, mais il s'agit cette fois de leur faire constater la relativité des savoirs historiques, leurs
principes et leur mode de construction, particulièrement en ce qui concerne le principe de causalité.
L'appareil expérimental consiste à faire confronter deux récits différents d'un même fait historique. Les chercheurs visent
également à identifier des stades de compréhension historique, celle-ci comprise comme saisie du récit et non de l'accès à la pensée historique
(Lee, Dickinson et Ashby 1996, 1997; Lee 1998a, 1998b). De la même façon, la
chercheuse française Nicole Lautier a voulu reconnaître le cheminement qu'emprunte de raisonnement causal d'élèves du secondaire
lorsqu'ils doivent l'exercer sur des faits historiques comme ceux rapportés dans les manuels (Lautier 1994a, 1994b, 1997). Pour les élèves de sa
recherche, le fait a de l'intérêt s'il paraît synonyme de changement, et les conséquences du changement semblent plus sujettes à explication que les
causes. Quant aux explications, c'est principalement par des analogies
qu'ils les construisent.
Encore sur la causalité, plusieurs recherches menées en France à l'Institut national de recherche pédagogique étudient la causalité à partir des
textes qui l'expriment et leur réception par les élèves plus qu'en raison de ses
modes d'élaboration. " Étudier l'histoire [...] scolaire, c'est étudier en priorité un ensemble de textes ", écrit François Audigier (1998, p. 15).
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