Chapitre 18

Auditer des attentes

 

 

"Enseignants, vous parlez trop". Philippe Meirieu apostrophait lors d’une conférence l’assistance. Et s’il avait raison ? Derrière cette assertion, il interroge non seulement la posture du professeur, mais encore la conception classique du métier, celle de la transmission. Enseigner, ce serait observer, et en premier lieu écouter. Que nous diraient les élèves si (un jour) on leur demandait leur avis, leurs attentes vis à vis de la discipline, plus largement, de l’Ecole ? Et comment pourrions-nous utiliser leurs réponses attendues ou pas ? Comment répondre à leurs attentes ?

 

 

scénario de départSe méfier de représentations erronées sur nos propres élèves

 

Mes élèves n’ont pas de secret pour moi ! D’après une enquête[1], les enseignants sous-estiment nettement ce que les élèves pensent de leurs propres compétences et de l’intérêt des disciplines étudiées. Selon les enseignants, 40 % des élèves pensent qu’ils finiront par avoir de bons résultats s’ils travaillent, alors que 90 % des élèves déclarent que les résultats obtenus ne sont dus qu’à eux et que leur avenir est entre leur main. Sept sur dix valorisent les effets positifs du travail fait en classe. Seuls trois sur dix pensent que les bons résultats sont liés à la chance (mais trois quand même).

 

Ailleurs,  si 40 % des enseignants déclarent passer moins de 20 mn à parler et 30 % même moins de 15 mn, en revanche, 82 % des élèves ont l’impression de passer leur temps à écouter le prof ! Alors qu’ils préfèreraient travailler en groupe (Image de la discipline et pratiques d'enseignement en histoire-géographie et éducation civique au collège. Les dossiers évaluations et statistiques - D.E.P.P. - N°183. Mars 2007)

Nos propres représentations, nous enseignants et autres travailleurs sociaux avec les enfants et leurs familles, peuvent engendrer des logiques d’intervention différentes :

 

L’information est à corréler avec les travaux sur le rapport au savoir des élèves et des enseignants ; par exemple, selon le point de vue adopté par les enseignants et les travailleurs sociaux sur les enfants et sur les familles en difficulté, il peut engendrer des logiques d'intervention différentes :

 

- soit ils considèrent l'enfant comme attaché à ses origines (idéologie du handicap socio-culturel - allant dans le même sens que les tenants de l'idéologie du don. On se cantonne alors à redécouvrir des origines qui pour la grande majorité sont déjà loin (on parle de « pédagogie couscous »), on limite insensiblement, parfois volontairement, le niveau d’exigences ; les grands textes, ce sera pour plus tard.

 

- soit ils voient l'enfant comme un  sujet en développement, en plein apprentissage. C’est ainsi qu’on a pu voir des travaux très ambitieux avec les élèves en grande difficulté, comme par exemple la réalisation d’un opéra baroque en latin avec les élèves du collège de Geyter de Saint-Denis (en images dans « la loi du collège », un documentaire de Canal plus il y a quelques années), parce que les profs « y croyaient ».

 

Et Rocheix de conclure : "Les enfants des banlieues ont besoin de vrais savoirs, de vraies activités intellectuelles et non de savoirs au rabais. Ils ont besoin que les activités d'apprentissage les confrontent à la complexité plutôt que de leur "faciliter" le travail en le morcelant en tâches mécaniques trop souvent vides de sens."[2]

 

On sait que l’attente positive exprimée aux élèves, un regard attentif porté sur le travail, sont des attitudes favorisant les performances moyennes du groupe. Attention donc à ne pas induire des contre-performances.

 

L’élève est une Personne

 

Si on reconnaît effectivement que l’élève est une Personne (Laurence Pernoud sur le bout des doigts), et qu’il doit être l’objet de toutes nos attentions (loi d’orientation de 1989), alors il faut bien admettre quelques principes de fonctionnement d’une approche centrée sur la Personne, ainsi qu’a pu la développer Carl Rogers, relayée en France par André de Peretti :

·         Les émotions sont constitutives de la Personne

·         La motivation est conçue comme autonome.

·         Les représentations, positives ou négatives, sont propres à l’individu.

Ce sont sur ces dimensions qu’il s’agit pour l’enseignant de travailler, ou pire de faire avec, au mieux d’en partir.

 

 

 

scénario de départSaisir toutes les occasions d'écouter nos élèves

 

"Je n’ai absolument pas de temps pour écouter des attentes hypothétiques." La classe pourrait se représenter comme un agglomérat d’atomes s’entrechoquant, vous dedans d’ailleurs, à la façon de la théorie de Lucrèce, leurs rencontres obligatoires mais aléatoires faisant advenir le savoir. Ce serait le cas si nous ne prenions pas en compte ce que les élèves nous disent, souvent maladroitement, dans les micro-espaces-temps que nous leur laissons. Comment pouvons-nous être plus attentifs et plus réceptifs ?

 

 

Les temps morts ou les temps extra-ordinaires sont des occasions quasi-inespérées d’expression des élèves, un espace plein que les enseignants d’EPS, comme ceux qui « partent » avec leurs élèves (stage de découverte, formations de délégués, etc.) connaissent bien. Ils n’ont pas en soi une « côte d’amour », mais ils savent profiter de ces moments d’échanges plus libres où tout sujet peut être abordé, dans le respect des rôles de chacun. Sur le chemin du stade ou de la piscine, chaque semaine, l’enseignant d’EPS recueille suffisamment d’éléments pour évaluer le climat scolaire, les relations affectives ou conflictuelles, les difficultés rencontrées, autant que le CPE dans son bureau peut le faire.

 

C’est en partie la raison pour laquelle se multiplient les initiatives de type « découverte » ou « intégration » selon les cas, au moment de la rentrée pour une classe spécifique, voire parfois tout un niveau (6ème ou seconde de lycée). Il s’agit de se « caler » mutuellement, entre attentes scolaires, attentes des élèves, attentes des enseignants. Les choses semblent facilitées pour la suite des événements et le déroulement de l’année scolaire. (voir organiser une sortie avec des élèves, )

 

 

 

Mais dans l’ordinaire de l’Ecole, les élèves arrivent en classe, pleins de "bruits et de fureurs" de l’extérieur, on ne peut l’ignorer. Mais en classe, le cadre de travail doit marquer une rupture, garantir un climat favorable aux relations et aux apprentissages. On retrouve cette préoccupation dans le travail de l’équipe du CESC du Collège de Saint-Genies par exemple. De la même façon, "l’heure de vie de classe" est un moment régulier où quelques éléments de pédagogie institutionnelle permettent de réguler les échanges et permettre l’expression d’attentes. La pratique du « quoi du neuf ? » laisse à chacun la possibilité de faire entendre ce qui le fait travailler ou lui fait obstacle ; la résolution se fait alors collective. (sur ces deux exemples, voir assurer la sécurité en classe ).

 

 

 

Les dispositifs de type tutorat ou entretien individuel sont mis en place pour travailler sur les attentes réciproques et de l’élève et de l’Ecole, pour développer autant d’interfaces qu’il est nécessaire. (sur le tutorat, voir « guider le travail personnel »).

 

 

scénario de départ Quelles sont les attentes à explorer ?

 

Lorsqu'on parle d'attentes à auditer chez les élèves, on parle naturellement d'attentes d'ordre scolaire. On peut, par exemple, explorer la représentation que les élèves ont de leur propre statut et de chacune des disciplines qu'ils doivent étudier, ou encore leurs attentes en matière d'"éducation au choix" d'orientation.

 

 

Les attentes concernant la situation d’élève dans un groupe

 

Dans une classe de 3ème pas facile, il m’avait semblé nécessaire de « mettre les choses au point » ; faire émerger quelques règles de fonctionnement général, édictées après une phase d’analyse partagée du règlement intérieur, d’échanges sur le sens de la scolarité, sur la place de la 3ème dans le cursus de ces élèves, sur les difficultés rencontrées dans ces dernières années de collège. Le travail s’est conclu par quelques propositions écrites individuellement, puis rassemblées sur un transparent. Ainsi, la classe de 3ème B donnait à voir sa représentation de l’élève, ce qu’ils en attendaient, ce que nous pouvions en attendre, nous les profs.

Cette « charte de l’élève » est le bien de chacun, mais aussi le signe du consensus partagé par le groupe. Ainsi, quand parfois dans l’année, la machine s’emballait, et le cours dysfonctionnait, nous en sommes revenus à la charte pour faire revivre ensemble ce qui apparaît autant comme des modalités de travail que comme des objectifs ambitieux pour eux comme pour l’enseignant.

Ce type de technique permet de dépasser la simple conception de l’Elève comme état administratif : c’est avant tout un « métier » selon Perrenoud, c’est à dire un ensemble relativement complexe de savoirs, d’apprentissages sur le tas, de règles implicites qui constituent ce que les Anglais appellent le « curriculum  caché » par opposition au curriculum officiel des savoirs des disciplines inscrits dans les programmes. Il est évolutif en fonction du niveau scolaire, de l’âge, du nouvel établissement fréquenté. Bref, il est un processus dynamique qui entre en résonance avec d’autres éléments subjectifs pour construire sa « motivation ».

Un élève, c'est…

Aller à l'école

Respecter

Avoir des droits

Avoir des devoirs

Essayer d'apprendre

Travailler

Apprendre à vivre en société

Connaître d'autres personnes

Avoir le droit d'expression

S'instruire jusqu'à 16 ans

Se perfectionner

Avoir le droit à l'éducation

Se cultiver

Construire son avenir

Construire sa propre personnalité

Apprendre à apprendre

Apprendre à respecter

Apprendre à avoir confiance en soi

Être autonome

Garder son indépendance

Apprendre ensemble

 

 

Sur les représentations de la discipline

 

« Y a que les bons pour aimer les maths ! » Quatre professeurs stagiaires ont interrogé 119 élèves dans le secondaire ; une question portait précisément sur ce point : très visiblement, certaines disciplines bénéficient d’un potentiel de sympathie, d’autres en sont privées.

 

On irait plus loin en affirmant que plus une discipline prend un habillage « scolaire » et pour tout dire ennuyeux (d’après les élèves), moins elle rafle les suffrages. Dans un paradoxe non moins grand, plus elle s’affiche scolaire, plus elle prend de l’importance pour des « bons élèves ». C’est que ce montrait un test effectué par l’équipe Monteil du CNRS : les performances des élèves, suivant leur niveau scolaire, varient en fonction de leur propre représentation de la discipline et de l’importance qu’elle revêt pour le groupe, et non seulement en fonction de leurs capacités propres.

 

Zone de Texte: u       Sur l’habillage de la tache, voir « analyser les ressources », page

Mais lorsqu’on présentait la même tâche dans une autre discipline, les élèves les moins bons progressaient de manière significative. Il y a donc tout intérêt pour les deux parties de travailler les attentes dans la discipline (cf. auto-test).

 

 

 

Sur sa capacité de projection à moyen terme

 

Tous les professeurs principaux en ont fait l’expérience, il est loin d’être suffisant de demander aux élèves de remplir une fiche en début d’année avec la mention « vœu ou souhait d’orientation » pour avoir rempli son devoir. L’inscription « 2ème », si générique soit-elle, exprime une attente, mais encore très confuse. Toute projection dans un avenir, proche ou plus lointain, ne va pas de soi, pour des adolescents qui éprouvent déjà les plus grandes difficultés à définir eux-mêmes leurs propres compétences. En même temps, travailler avec eux leur capacité à se projeter les aide à mieux se construire. (Voir aussi l’enquête sur les méthodes de travail, « analyser des pratiques »,).

 

En ce sens, « l’éducation aux choix » a été inscrite dans le corpus du collège, mais comme souvent, elle a fait l’objet d’une relégation ou d’une hyper-spécialisation ; certes, il peut y avoir quelques séquences spécifiques de connaissances préalables et nécessaires sur les voies, les offres scolaires de proximité, et la conseillère d’orientation saura bien le faire. Mais l’enjeu est d’abord pour tout enseignant de mettre savoirs et compétences en projection, de sorte à donner des repères stables aux jeunes. Ainsi, toute approche nouvelle, tout savoir doit être projeté vers un futur proche, celui du cycle suivant, avec ses possibles encore incertains, signalés à la manière de panneaux de signalisation routière, comme autant de ressources pour telle ou telle voie possible.

 

L’étape suivante serait de négocier des niveaux de compétence selon les projets que l’on se donne ensemble : Mounir dans un projet de 2ème générale et  Mélanie dans un projet de 2ème SMS c'est tous deux expriment des attentes différentes vis à vis de telles disciplines, et dans les disciplines, vis à vis de tels objectifs. Il y a une tension entre savoirs communs à acquérir et attentes de spécialisation qu’il importe d’expliciter avec eux… et entre nous. Ainsi donc, prendre appui sur les attentes des élèves permet de beaucoup mieux orienter sa manière de conduire le cours et de finaliser un certain nombre d’objectifs. On n’apprend pas des savoirs en soi, mais des savoirs comme autant de ressources pour aller plus loin.

 

 

scénario de départ Les attentes connues, que faire ?

 

Auditer des attentes est le début d’un processus : une fois recensées, que fait-on des attentes ? On les intègre dans le dispositif pédagogique. Les recenser et ne rien faire après serait s’exposer à une parole donnée et non prise en compte. Risque important. Cela met en jeu la capacité d’une équipe, d’un établissement à faire jouer de la souplesse, des marges de négociation, à créer un ou des espaces de choix.

 

Tout choix est un acte éducatif. Il participe de la finalité de l’Ecole, condensée dans « autonomie de l’élève ». En tant que tel, il fait l’objet d’un accompagnement pédagogique attentif. Le problème est qu’à l’Ecole, on ne choisit pas.

 

Les différents dispositifs interdisciplinaires installés récemment dans le secondaire (IDD, TPE et les PPCP en lycée professionnel) en se fondant très explicitement sur l’implication de l’élève, sur ses choix. Si le choix existe, on choisit comme une offre sur le marché, on ne le construit pas.  La consultation des élèves en amont du choix, les démarches de dévolution du projet font de l'élève un acteur collectif de l'offre.

 

 

L’élève peut participer à la construction de sa formation

 

"Demander l’avis aux élèves, c’est coûteux en temps, en énergie" Il y a une grande différence entre choisir entre deux choses qui existent et construire quelque chose qui n'existe pas encore. C’est en partant de ce principe qu'en 1998, l’équipe du collège de Bissy (académie de Grenoble) s’est lancée dans une consultation des élèves en fin de 6ème. Délaissant volontairement toute connotation disciplinaire (monde de l’enseignant) pour adopter un style à portée des élèves de 12 ans, l’équipe a sondé les élèves sur leurs goûts, aptitudes et envies ; l’objectif était en début de 5ème d’adapter au plus prêt l’offre scolaire des modules interdisciplinaires. Le choix se construit donc pas à pas, dans une continuité qui doit toujours être soulignée ; c’est déjà permettre aux élèves de se « mettre en projet ».

 

Comme toute « innovation » dans un contexte donné, cela requiert un collectif plus organisé, des échanges sur les stratégies possibles et sur les outils à utiliser, une régulation du dispositif ; ce n’est pas tant « plus » travailler, mais organiser le travail différemment en développant une co-responsabilité de tous les élèves qui n’existait que peu alors à ce stade de formalisation (Voir « travailler en équipe »). Par exemple, en suivant l’organisation du collège de Bissy.

 

>> La prise en compte du choix s’organise en 3 phases :

 

Mai : 1ère phase

 

  • · Questionnaire individuel de sensibilisation auprès des élèves de 6ème : sondage selon les goûts, les centres d’intérêt, les domaines de réussite, les aspirations des élèves (voir l'encadré ci-contre).

  • · Détermination des « profils » d’élèves : dépouillement, analyse pour définir des besoins.

  • · Thèmes retenus, activités envisagées, productions possibles, clarification des profils d’élèves souhaités par les enseignants

  • · Proposition d’ateliers.

 

Juin : 2ème  phase

 

  • · Grille de choix des ateliers par ordre de préférence (classés de 1 à 8) complétée dans toutes les classes simultanément par les élèves à partir d’un descriptif succinct de leurs contenus et des profils envisagés. Les animateurs des ateliers ne sont pas cités.

  • · Sur les ateliers retenus : traitement statistique en respectant au moins l’un des deux premiers choix.

  • ·Première répartition des élèves

 

Septembre : 3ème  phase

 

  • · Questionnaire et grille de choix proposés aux redoublants de 5ème qui sont intégrés en priorité dans la répartition provisoire

  • · Concertation de l’équipe pédagogique pour affiner (cas particuliers)

  • · Répartition définitive dans les 8 ateliers pour deux sessions semestrielles.

 

Un questionnaire pour sonder les élèves

 

Voici à titre d'exemple un questionnaire de sensibilisation par un sondage sur les goûts, les centres d’intérêt, les domaines de réussite, les aspirations des élèves. D’après une expérience du collège de Bissy (académie de Grenoble, 1998).

 

1 Voulez-vous apprendre à vous protéger des bruits ?

2 Aimez-vous bricoler avec du papier, des outils ? 

3 Auriez-vous envie d’en savoir plus sur Richard Cœur de Lion ou Robin des Bois ?

4 Etes-vous plutôt « scientifique » ?

5 Utilisez-vous l’ordinateur pour autre chose que des jeux ?

6 Voulez-vous savoir comment on entend un bruit ?

7 Aimeriez-vous faire et goûter de la cuisine anglaise ?

8 Aimeriez-vous concevoir, inventer ?

9 Aimeriez-vous présenter un journal télévisé ?

10 Y-a-t-il des tâches manuelles que vous réussissez bien ? Lesquelles ?

11 Voudriez-vous en savoir plus que la journée d’un collégien anglais ?

12 Etes-vous curieux de ce qui vous entoure ?

13 Vous arrive-t-il d’utiliser des outils pour réparer, bricoler, inventer ? Lesquels ?

14 Aimez-vous les voyages ?

15 Etes-vous intéressé(e) par les phénomènes de l’espace ? 

16 11 km est plus grand que 10 000 000 mm  ? 

17 Aimez-vous improviser de petits sketches ? 

18 Avez-vous du plaisir à vous déguiser et à jouer différents personnages ?

19 Aimeriez-vous en savoir plus sur Halloween et faire la fête ? 

20 Aimez-vous jouer avec votre visage, votre voix, votre corps pour les rendre plus expressifs ? 

21 Aimez-vous faire rire, émouvoir, surprendre les autres ? 

22 Aimez-vous faire du bruit ?

23 Seriez-vous intéressé(e) par ce qui touche à la route, aux moyens de transports et aux activités qui en dépendent ? 

24 Avez-vous envie de découvrir les poètes d’hier et d’aujourd’hui ?

25 Etes-vous intéressé(e)  par ce qui se rapporte aux secours en général (pompiers, secourisme) appliqués à la route ? 

26 Aimez-vous lire des pièces de théâtre ou aller voir des représentations théâtrales ?

27 Avez –vous envie de fabriquer des bruits ?

28 Souhaitez-vous lire de beaux textes et en créer vous-mêmes ?

29 Prenez-vous plaisir à faire jouer les autres ? 

30 Aimez-vous écrire ?

31 Voulez-vous découvrir les bruits de votre corps ?

32 Avez-vous envie d’apprendre comment écrire des poèmes ?

33 Aimez-vous pratiquer des jeux de société ?

34 Vous préférez vous amuser en révisant plutôt que réviser en s’amusant ?

 

L’enquête menée auprès des élèves crée de l’interrogation et des attentes certaines ; les professeurs, même s’ils avaient des pré-projets ou des thèmes en tête, on le constate dans le questionnaire, ont pu réguler leur proposition ; en tout cas, professeurs comme élèves étaient en place pour bien partir dès le début de l’année.

 

 

Questionner les élèves pour adapter son action pédagogique

 

"Si nous les laissons choisir, soit ils répondent aux désirs de leurs parents, soit ils suivent leurs copains." La nouvelle équipe du collège Gabriel Fauré à Paris, menée par sa principale adjointe, Mme Bonneuil, avait mis en place un dispositif qui s'appuyait sur la prise en compte des choix des élèves et le décloisonnement des classes. A l'issue de la première année, l'équipe, soucieuse, inquiète même d'avoir introduit de la diversité là où il n’y avait jusque là que de l’homogénéité, s’est enquis des effets produits avec grande objectivité et prudence requises. Elle a donc procédé à une évaluation fine des facteurs de choix des élèves en leur demandant de répondre à un petit questionnaire (voir ci-dessous). 156 élèves de 5ème ont répondu.

 

>> Le questionnaire portant sur le dispositif « parcours diversifiés »

 

Les questions                                      Les réponses en %

Vous attendiez les parcours…

Avec impatience                                                                                             38

Vous vous en moquiez                                                                                    15

C’est une corvée pour vous                                                                            6

On vous en avez parlé en bien                                                                      52

On vous en avez parlé en mal                                                                       6

Cela vous fait peur                                                                                         1

C’est sympa parce que vous retrouvez des copains d’autres classes      50

Votre affectation

Etes-vous content de votre affectation ?                                                 73

Souhaitiez-vous autre chose ?                                                                     27

Votre choix est-il strictement personnel ?                                                61

Avez-vous discuté des parcours avec vos parents ?                                 46

- Vous ont-ils influencé fortement ?                                                           0

- Vous ont-ils conseillé ?                                                                               23

- Avez-vous suivi leur avis ?                                                                          7

- Etiez-vous du même avis ?                                                                         24

Si vous n’avez pas parlé avec vos parents, c’est parce que :

- Vous aviez peur de leur choix                                                                    5

- Vous n’aviez pas envie de parler de cela car cela ne les regarde pas           12

- C’est pour les embêter                                                                                0

- C’est votre parcours et ce sont vos progrès à vous qui comptent       40

- Vos parents ne s’occupent pas de ce que vous faites                            3

Les motivations de votre choix

Vous avez choisi tel ou tel parcours parce que :

Vous aviez une idée claire de ce que vous vouliez                                     4

Vous étiez curieux de connaître de nouvelles choses                               40

Vous voulez améliorer vos connaissances, car vous êtes doué et voulez en savoir plus      54

Vous avez des difficultés dans les matières concernées et vous voulez progresser          26

Votre camarade a choisi le même et vous voulez être avec lui (ou elle)         21

Vous aviez une petite idée des profs et vous avez choisi par rapport à eux 18

Le contenu des parcours

Vous a-t-il été clairement expliqué ?                                                          55

Vous avez tout compris                                                                                 59

Vous n’avez pas tout compris                                                                       15

Vous aviez des questions à poser, mais vous n’avez pas osé                    3

>> Les enseignements du questionnaire

 

 

 

 

 

 

Faire participer l’élève à l’évaluation collective d’un dispositif

 

"Est-ce que c'est valable au point de vue résultats ?" Ainsi, en travaillant le concept de choix de l’élève, dans un espace somme toute très limité (deux heures par semaine), l’équipe a développé sur trois années des compétences de réflexion relativement poussées chez leurs élèves de cycle central : consultation en amont et explicitation régulière, évaluation partagée et reconfiguration modérée en fin de chaque session semestrielle ; les élèves sont devenus de vrais acteurs collectifs de l’offre, et ont, dans un sens, contribué à faire évoluer les pratiques enseignantes, individuelles et collectives.

 

Lors des moments de bilan semestriels, des rôles ont été délégués, et ce n’était pas pour parler du papier toilettes qui manquait (« marronnier » des conseils de classe, qui permet aux élèves de parler de tout, sauf de la classe) : les actions pédagogiques, les supports, les traitements proposés faisaient l’objet d’une évaluation dite « à 360°» : autour d’une tablée, chacun tirait un bilan précis et fin sur les apprentissages, les avantages, les progrès encore à réaliser ; la parole prise est une parole représentée, construite et intelligente, les attentes formalisées étaient tout à fait réalistes et les enseignants les ont pris toujours en compte.

 

Ce serait faire un mauvais procès à ce type de dispositif que de lui assigner des objectifs trop élevés en terme d’apprentissages et d’acquisition de savoirs, voire de laisser croire qu’il résoudrait des difficultés scolaires importantes, qui relèvent d’autres types de dispositifs (remédiation, soutien…). Mais les élèves ont sérieusement progressé dans la conception qu’ils ont désormais à leur propre scolarité, une dimension qu’en anglais on nomme « empowerment » : se donner un capital d’intervention suffisant pour agir dans son monde. Ils ont participé activement à toutes les étapes de la construction de ces modules de formation, leurs attentes, leurs avis, leurs réalisations ont été suivis d’effets dans la classe, dans l’établissement. Cela n’est-il pas le fait de l’Ecole ?

 

Zone de Texte: scénario de départ Auto-test

Lors du premier cours avec vos élèves, écrivez au tableau ces trois questions :

  1. La discipline X, à quoi cela sert ?

  2. Qu’est-ce que le cours de X a de particulier ?

  3. Qu’est-ce qu’on attend de moi dans cette matière ?

 

Les élèves prennent le temps de mettre par écrit les réponses.

Puis sur un grand tableau, voire trois panneaux affichés au mur, on reporte une à une les différentes réponses, en envisageant ensemble les rapprochements, les différences, les niveaux.


[1] Marc BRU et Pierre RIVANO, Les enseignants connaissent-ils le point de vue de leurs élèves sur leur scolarité ?, Revue française de pédagogie, n°137, déc. 2001

[2] Rochex, J.-Y., printemps 1996, Au-delà des cités, c'est de la cité qu'il s'agit, Actes des rencontres du GFEN. à Aubervilliers en 1995, "Savoir et citoyenneté en banlieue", Dialogue, n° 83-83, GFEN, Ivry, pp. 2-6.